Rechercher

Recherche avancée

Accueil > Etre femme et immigrée à l'époque de la construction navale à la Seyne-sur-Mer > Fondatrice de l'association Femme dans la cité, de l'association Espace solidarité et formatrice en alphabétisation à La Seyne

Etre femme et immigrée à l'époque de la construction navale à la Seyne-sur-Mer

Imprimer

Transcription : Fondatrice de l'association Femme dans la cité, de l'association Espace solidarité et formatrice en alphabétisation à La Seyne

Collecteur : Prestataire exterieur
Langue : Français

Qualité du son : bonne


Présentation du témoin Écouter cette séquence

Mes parents vivaient à Menzel Bourguiba, à côté de Bizerte. J'ai vécu dans une famille avec beaucoup de frères, je suis la n°2, frère aîné, moi, quatre frères, trois sœurs. On a vécu dans une grande maison avec mon grand-père et mon oncle.


Un père, chauffeur de taxi Écouter cette séquence

Madame : Mon père a toujours travaillé dans les taxis, chauffeur, puis propriétaire de deux taxis. Il avait des chauffeurs.
Toujours heureux de conduire son taxi, sa voiture est toujours propre, bien entretenue, il disait que c'est l'image du chauffeur. A la fin de la journée, quand il rentre, souvent, il nous mène un peu promener ou chez mes tantes, des amis, ou faire un tour.
Dans les années 60 y'avait pas beaucoup de personnes qui avaient une voiture.

Interviewer : Vous étiez une famille privilégiée ?
Madame : Non, mais une famille heureuse, on s'entendait bien, dans notre grande maison y'a toujours eu du monde, toujours entourés.


L'importance de l'école pour la mère Écouter cette séquence

Interviewer : Votre mère, comment elle vivait ?
Madame : C'est une reine, par le fait d'avoir beaucoup d'enfants et surtout cinq garçons, ça lui donne un statut de femme qui a réussi. Le fait aussi de pousser les enfants à bien travailler à l'école. Elle était toujours derrière nous. Quand on passait le bac, elle a dit à ses frères et sœurs de pas trop venir à la maison, pour elle le bac c'était très important, du coup tous on a eu le bac. Elle n'a pas fait beaucoup d'études, elle a appris un peu à lire et à écrire à la mosquée. Pour elle faire des études c'est très très important, surtout pour une fille. Elle essaye de nous préparer, on dirait que pour elle les temps vont changer et qu'il faut pas rester à la maison. Elle était quand même fatiguée, à la maison y'a toujours du travail. C'est une personne qui veut pas s'arrêter. Elle se repose pas.

Interviewer : Elle vous a poussés à faire des études, plus que votre père ?
Madame : Oui, mon père est souvent sur les routes, il est là juste à la fin du trimestre quand y'a le bulletin, pour la sanction, si on a pas bien travaillé. Mais ma mère est régulièrement derrière nous, elle sait.


Devenir enseignante Écouter cette séquence

Interviewer : Vous aimiez l'école ?
Madame : Oui, j'allais à la mosquée avec mon grand-père dès l'âge de deux ans, j'apprenais. A cinq ans, j'ai commencé le primaire et j'ai fait d'un trait toutes mes études. J'ai enseigné pendant un an et demi en primaire dans une école française, après je me suis mariée, je suis venue ici.

Interviewer : Vous avez su jeune que vous vouliez être enseignante ?
Madame : Mon père dit une fille il faut qu'elle soit dans l'enseignement, pas les usines ou les bureaux, comme ça y'a des horaires, des vacances. On était un peu conditionnées, mes trois sœurs sont des profs en Tunisie.

Interviewer : Ça correspondait aussi à un goût chez vous ?
Madame : Sincèrement, au lycée, au moment de l'orientation, on a eu une information sur l'agriculture et j'ai voulu faire agronome, travailler avec la terre. La personne qui est venue, envoyée par le ministère, disait qu'ils vont nous donner un bout de terrain et une voiture, alors j'étais contente et quand je suis rentrée mon père m'a dit pas question, tu vas aller dans une section littéraire. Il a fallu que je renonce. J'avais seize ans, il faut aller loin, interne, l'année d'après.


L'Analphabétisme Écouter cette séquence

Quand je suis venue ici en France, y'a beaucoup de choses qui m'ont surprise, mais y'a une chose qui m'a bouleversée dans mon intérieur, c'est quand j'ai vu des femmes de mon âge et plus jeunes que moi, de Tunisie, d'Algérie, qui savaient pas lire et écrire. Je pensais pas, je l'ai appris ici.
Moi j'allais à l'école, les voisines. Peut-être le fait qu'on sortait pas beaucoup et y'avait pas la télé. Je voyais la fille aller à l'école comme le garçon. Ici, quand j'ai commencé à faire l'alpha sur la cité Berthe, ou aux Œillets, ça m'a frappée, ils ne sont pas allés à l'école, en plus ils sont venus en France, quel décalage. C'est quelque chose que j'accepte pas, ça doit être dur.


L'orientation professionnelle Écouter cette séquence

Interviewer : Quand votre père a refusé votre choix d'orientation, comment vous avez réagi ?
Madame : J'ai pleuré un bon coup, après s'il a refusé c'est comme ça. Le jeune âge aussi et puis j'étais la seule fille. L'essentiel pour ma mère c'est qu'on sorte avec un diplôme, pour elle c'est une liberté.

Interviewer : Si vous aviez suivi des études d'agronomie, votre vie aurait été différente ?
Madame : Certainement, peut-être que je serais restée là bas, je sais pas. J'étais tellement motivée. Mais je regrette pas, je suis bien aussi. Mon parcours, c'est comme ça, je suis contente.


Venir en France Écouter cette séquence

Interviewer : Est-ce qu'il y avait autour de vous des gens qui vivaient en France ?
Madame : Ma tante, des cousins, plus l'Italie et l'Allemagne, mais aussi en France. Un oncle à Monaco.

Interviewer : Vous vous souvenez ce qu'on disait de la France à cette époque ?
Madame : Ils aiment bien la France, déjà. Tous ceux qui sont venus, ils vivent bien, ils construisent des maisons. Il disent que du bien sur la France et les français, c'était le souhait de chacun de venir en France.

Interviewer : Vous, ça vous faisait envie ?
Madame : Pas spécialement, mais oui. J'entendais ça. J'étais pas vraiment portée, après la destinée a fait que je suis venue. Je suis la seule, mes parents étaient contre qu'on se marie et qu'on aille loin. Mes frères et sœurs sont mariés, là-bas. J'ai un de mes frères au Qatar, une de mes sœurs à Dubaï, mais après leur mariage, pour une raison professionnelle, pour des missions. Parce qu'on veut rester ensembles tous. Moi j'ai fait peut-être ce qu'il fallait pas faire, j'ai insisté pour me marier puis venir ici.


La rencontre avec le futur mari Écouter cette séquence

Madame : Il vivait ici, il est venu ici à l'âge de 7 ans. A 25 ans, il est rentré pour la première fois en Tunisie. On s'est connus, un an après on s'est mariés. Ma mère était pas contente, elle a tenu bon, elle a dit tu n'y vas pas, tu vas pas être bien, loin de nous, de tes frères, de la terre de Tunisie. C'est que mon père qui m'a aidée un peu, il était avec moi.

Interviewer : Votre père comprenait mieux votre décision ?
Madame : Peut-être par le fait qu'il sort beaucoup, qu'il fréquente beaucoup, il est plus ouvert quand même. Ma mère, si elle décide quelque chose, c'est pas autrement, pour la faire changer d'avis c'est difficile. On fait tout pour la convaincre, on joue les sentiments.
C'était très dur, elle a beaucoup pleuré, moi aussi, j'étais la deuxième, mes sœurs sont jeunes, j'ai beaucoup de différence, 13, 15 et 19 ans de différence. Elle est restée avec les toutes petites, moi j'étais sa copine, sa confidente, on sortait ensembles. On reçoit, on voit quel repas on va préparer. On était très complices. C'était dur pour elle, mais pour moi aussi, j'ai beaucoup souffert les premiers temps.


Le départ de Tunisie Écouter cette séquence

Interviewer : Avec le temps, votre mère a fini par accepter votre décision ?
Madame : Il y a eu le mariage, la fête, elle voit que c'est un garçon très gentil, travailleur, y'a pas eu de problème. C'est cet éloignement, cette Méditerranée, on se voit pas quand on veut.
C'est lui qui a tout fait ici, je suis venue, y'a l'appartement, y'a tout. J'avais 22 ans et lui 26.

Interviewer : Vous saviez que ce serait définitif ?
Madame : Il a fallu tout faire pour que ce soit pour le meilleur et pour le pire, il faut pas du jour au lendemain, divorcer, il faut construire.
Pour moi c'était une installation définitive. Je vois des voisins qui disent on va rentrer, mais ils sont toujours là. Même des gens qui vivent seuls, qui ont laissé femmes, enfants, au bled, aujourd'hui ils sont à la retraite, mais ils sont ici. C'est pas vrai, on rentre pas. On est immigrés là-bas, comme ici. Y'a un écart quand on rentre. On le ressent beaucoup.


Le racisme en France et en Tunisie Écouter cette séquence

Madame : Drôle de vie qu'on a, ici on sait pas où on est, mais là-bas pareil. On veut rentrer pour se ressourcer, mais on entend quand même des réflexions, par les voisins, la famille, qui font mal. Ici on n'est pas bien, là bas aussi on n'est pas bien.

Interviewer : Maintenant, vous entendez plus de réflexions qui font mal là-bas que ici ?
Madame : Avec l'âge, je deviens plus sensible. Ici, avant je disais le racisme c'est n'importe quoi, je suis pas concernée. Mais avec l'âge, l'expérience, oui, y'a du racisme. Y'a des personnes qui vont te faire du mal, te critiquer par derrière, ils veulent pas que tu réussisses, pas que tu avances. Dans la vie de tous les jours, le travail, il faut tous les jours se battre. Je le ressens. Avant non, je fais abstraction, j'ai pas envie de m'arrêter à ça, j'ai envie d'avancer.
Maintenant, avec l'âge, j'ai le temps de contempler, de réfléchir, de comprendre. Je comprends certaines choses qui me font très mal.
[pleurs]
C'est notre vie, c'est comme ça, faut pas passer outre, c'est notre réalité, nous qui sommes ici.

Interviewer : Quand vous allez en Tunisie, pourquoi on peut être mal vu en tant qu'immigré ?
Madame : Les voisins, la famille te font des réflexions. J'ai pas construit de maison là-bas, j'ai acheté ici. C'est mon père qui m'a donné une maison.
Pas directement, mais on ressent quand même les choses, cette pression familiale, sociale.
T'es pas capable, tout simplement, de réussir dans ton pays, c'est ça. Un peu de jalousie. Moi, c'est la réussite scolaire de mes enfants, les préparer pour la vie. Je travaille, on est salariés tous les deux, mais c'est des salaires modestes, on a préféré acheter ici et vivre normalement, pas en se serrant la ceinture, que les enfants fassent la musique, la natation, qu'ils voyagent. La petite dernière est dans une école privée que je paye, c'est un choix qu'on a fait, c'est comme ça que j'ai pas pu, peut-être, acheter des terrains, l'or. C'est tout ce que j'ai, j'ai investi ici, pour mes enfants, qu'ils aient une chance d'avoir du travail au même titre qu'un français, parce que c'est dur.
Elles ont la peau mate, ce sont des filles, des prénoms maghrébins, donc il faut avoir des diplômes et une sacrée personnalité pour trouver du travail et réussir.

Interviewer : Est-ce que vous pensez aussi qu'on vous a critiquée en France et en Tunisie parce que vous êtes une femme et que vous avez fait un choix d'indépendance ?
Madame : Critiquée, oui, c'est vrai. Par exemple, dans une association, il faut qu'on sorte, pour faire des réunions, mener des actions, puis les enfants. Oui, c'est vrai, y'a des critiques, « Où tu vas aller comme ça ? »

Interviewer : Finalement vous êtes dans une situation toujours critiquable ?
Madame : Oui, mes filles me racontent sur leurs copines, quand elles viennent à la maison, elles disent on aurait aimé que mes parents achètent ici. Mais y'a de plus en plus de familles qui achètent ici, parce qu'on a compris qu'on va pas rentrer, juste pour les vacances.

Interviewer : Aujourd'hui la situation de vos enfants vous réconforte par rapport à ces choix difficiles ?
Madame : Oui, ils ont fait des études, les filles sont heureuses, je suis rassurée. Il me reste les deux derniers, mais je pense qu'ils vont suivre. Les deux grandes essayent d'aider les petits et de les raisonner. Ils sont proches, malgré les différences, 3 ans et 7 ans, ils sont très proches et ça me réjouit.

Interviewer : Vous avez amené cette proximité que vous avez connue dans votre enfance ?
Madame : Oui, pour nous c'est évident, c'est normal. Le fait qu'on rentrait aussi tous les ans, pas comme maintenant. Ils ont vu comment on vit là-bas, tous ensembles, la porte ouverte, et qu'on a cette affection, qu'on est solidaires.


L'arrivée en France Écouter cette séquence

Interviewer : A 22 ans, vous veniez de vous marier. L'arrivée en France, comment ça se passe pour vous ?
Madame : Mon mari est venu un peu avant, je l'ai rejoint. Quand je suis arrivée, j'ai trouvé ça très animé, c'était en décembre, très froid. J'ai remarqué qu'il y a beaucoup de femmes dans la rue, pas voilées, beaucoup de tunisiennes, même ma belle-mère, j'étais contente pour elles, elles font comme les françaises. Elles sont dans la rue, sur le marché. Elle fait les papiers, elle va à la banque, chose que ma mère faisait pas. Je me suis dit la femme a un peu plus de rôle à l'extérieur. Dans le temps, parce que maintenant la femme en Tunisie elle est plus évoluée que nous ici, à diplôme égal et vie sociale égale. Du temps de ma mère, la femme s'occupait des enfants, de son intérieur. Ma belle-mère faisait les courses, payait le loyer. Elle était propulsée, il faut qu'elle se débrouille.


L'ouverture aux autres, la sociabilisation Écouter cette séquence

Interviewer : Vous, vous aviez envie de faire plus de choses que votre mère ?
Madame : Oui, je me rappelle, le mercredi après midi je travaillais pas, je rencontrais des collègues de travail. J'avais déjà ça en tête, se mélanger avec les autres et c'est comme ça que je vais avancer. Mais c'est vrai que j'ai pas en tête de faire autre chose que mon travail.
C'est quand je suis venue ici que je me suis dit il faut que je m'en sorte dans cette société, il faut y aller. Quand je suis venue, y'avait pas les stages, les associations, toutes ces mesures pour aider les jeunes. C'est par hasard que j'ai rencontré une dame dans le bus, j'ai laissé ma place, Rita Cazarini. J'avais Nabila dans la poussette, cette dame qui monte, moi j'allais à Brunet à l'hôpital, je lui laisse ma place, on a commencé à parler.
A partir de ce moment, je suis là aujourd'hui. Ça m'a beaucoup aidé, cette femme, son sourire, ses paroles, elle parlait doucement pour que je comprenne. Quand je parle, avant je faisais très attention, le verbe, l'accord, pour sortir la phrase, pas comme maintenant je parle n'importe comment. Elle a compris que j'étais seule. J'avais un peu des difficultés. Mon mari est sur les chantiers. J'ai éprouvé le besoin de rencontrer d'autres jeunes, autrement je suis avec ma belle-mère et les copines de ma belle-mère.
Elle m'a dit je peux aller à Saint-Jean-du-Var, une association qui accueille des personnes pour apprendre le français, faire du tricot. Et allez. Mon mari m'a dit faut y aller ça te fera du bien.

Interviewer : A ce moment là ça faisait combien de temps que vous étiez en France ?
Madame : J'ai attendu deux ans pour avoir ma fille. J'ai pas eu d'enfants tout de suite, parce que ma mère m'écrivait des lettres. Elle me disait faut pas faire des enfants tout de suite, il faut faire des études d'abord. Travaille, fais quelque chose, les enfants ça va venir. J'ai écouté ma mère, j'ai essayé de faire de l'anglais, pendant un an avec le CNED, ça marchait pas c'était très dur.
J'ai essayé de voir, boulangerie, machin, ça a pas marché. Je suis tombée enceinte quand même, y'avait la pression, ici ma belle-mère me dit « oh, ça va faire bientôt deux ans, t'as pas d'enfants »...
Ça veut dire j'avais 25 ans quand j'ai eu ma fille et j'ai rencontré cette dame, et tout de suite j'ai commencé à aller deux fois par semaine. Je prenais deux bus, pour aller à Saint-Jean-du-Var, être avec un groupe de femmes de toutes origines, des africaines, des marocaines... En Tunisie, on voit pas comme ici beaucoup de personnes qui parlent plusieurs langues, c'est coloré, c'est beau. Moi j'étais partante, ça m'a plu, c'était une richesse, on parle de choses et d'autres. Je faisais ni couture ni... j'aime pas trop la couture en fait. Ce qui me plaît c'est partager, quand y'a les fêtes de Noël, j'allais aussi avec mon gâteau ou mon bouquet de fleurs, faire la fête avec elles.
J'ai commencé aussi à parler de moi, de ce que je voulais faire, de ce que j'aime faire, de ce que j'ai fait. On m'a proposé de faire des animations pour les enfants le mercredi, à Sainte Musse. J'avais pas le permis, je prenais le bus, ma fille était avec moi.


Formatrice en alphabétisation dès 1989 Écouter cette séquence

Madame : Et ainsi de suite, j'ai commencé à passer des stages, mon BAFA. J'aidais bénévolement la formatrice pour l'alphabétisation. Après j'ai passé le DUF, diplôme universitaire de formateur, qui a duré deux ans, sur Aix. En 89, j'ai commencé à travailler avec le GRETA. J'intervenais au centre social de Berthe, l'après-midi pour des femmes, le soir pour des hommes qui sortaient des chantiers navals, qui étaient licenciés, dans le cadre de reclassement ou de formation, ils apprenaient à lire, à écrire.

Interviewer : Vous avez suivi le fil de l'enseignement ?
Madame : Oui, toujours, ça m'a suivi. Mon mari m'aidait beaucoup. A la maison il m'aide pour le ménage.


La participation du mari à la vie quotidienne Écouter cette séquence

Madame : Son père était comme ça avec sa mère aussi. Les garçons aussi aident leur mère. C'est pas moi qui lui ai appris.
Pour les courses, on allait souvent ensembles. Y'a que la cuisine il sait pas faire, tant pis.

Interviewer : Pour l'éducation des enfants, c'est différent de ce que vous décriviez avec votre père ?
Madame : Par le fait qu'il travaille toujours à l'extérieur, il s'intéresse, mais il a pas beaucoup de temps. Avant, il avait une entreprise, c'est lui qui faisait tout, les papiers, les chantiers.
Il s'intéresse quand même et pour lui c'est très important l'école, il faut qu'ils aient des bons résultats. Il allait aux réunions parents-élèves. Mais je pense que les mentalités ont changé. Mes frères, mes sœurs me disent « faut que le petit réussisse à l'école », ils payent des profs pour venir à la maison, ils s'intéressent aux études de leurs enfants, encore plus que nous ici.


Un mari électricien Écouter cette séquence

Interviewer : Quand vous vous êtes mariée, quel était le travail de vote mari ?
Madame : Électricien dans le bâtiment. Il était salarié dans une entreprise, dix ans, après il a monté son entreprise, il est devenu artisan. Y'a pas longtemps il a arrêté pour encore travailler dans une entreprise, c'est fatigant les papiers, moi je pouvais pas l'aider.


La Seyne pendant les chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Est-ce qu'il lui est arrivé de travailler pour les chantiers navals ?
Madame : Non, son père il a travaillé là bas, maintenant il est décédé. Il a été licencié en 83 ou 84. Et ses deux frères ont travaillé là-bas.
Dans les chantiers navals, y'a pas beaucoup de travail depuis qu'ils ont fermé, y'a quelques entreprises qui travaillent.

Interviewer : Quand vous êtes arrivée en France, votre beau-père et vos beaux-frères travaillaient encore aux chantiers ?
Madame : Oui, je me rappelle, à onze heures, ba ba, les voitures qu'il y a devant, les gens qui courent de partout, c'était autre chose. Les voisins travaillaient là-bas, tous presque de la Rouve.

Interviewer : La ville vous l'avez trouvée comment ?
Madame : Ça a beaucoup changé. Elle ressemble un peu à Menzel Bourguiba, y'a un port, y'a l'arsenal. Sauf que nous y'a beaucoup de vélos à midi, ici beaucoup de voitures, des motos. Elle était plus animée, y'avait beaucoup de monde et de vie.


La fermeture des chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Pendant les années 80, vous avez vu les choses se dégrader ?
Madame : De plus en plus j'entends parler de chômage, d'hommes à la maison, de divorces, de problèmes dans les familles, dans la scolarité des enfants.

Interviewer : Votre beau-père s'est retrouvé à la maison ?
Madame : Oui, il avait 47 ans, il était jeune. Après il a retrouvé du travail mais ça a pas duré longtemps, il a retrouvé du travail dans les chantiers dans une autre entreprise.
Il était fier de mettre un bleu, il allait à pieds, il traverse toute la Rouve, souriant. Malheureusement ça a pas duré longtemps, un an. Après l'entreprise est partie, il est resté au chômage. Il est resté jusqu'à 55 ans au chômage, après la préretraite, après la retraite.

Interviewer : Au chantier, il était embauché ?
Madame : Oui. Mes deux beaux-frères, dans la soudure. Lui, étanchéité. Il travaillait bien, il gagnait bien sa vie. Tous les ans il rentre au pays avec sa famille. Ça a changé, même sa personne. Il se lève quand même, pour aller au marché, après il rentre, il est devant la télé.
Ils avaient un peu plus de crédits après, de difficultés. Heureusement qu'il y a les enfants qui aident un peu.
Il aimait travailler, il a travaillé très jeune en Tunisie. Il est venu ici avec des amis. Tout de suite il a travaillé. Après il a ramené sa femme. Il est venu pour travailler, il avait un contrat. Après il a trouvé une villa, après ils ont acheté ici.


La vie professionnelle après les chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Vos beaux-frères ont travaillé très jeunes aux chantiers ?
Madame : Oui, un a fait je pense un BEP, et il est rentré aux chantiers. Les autres ont travaillé un peu aux chantiers, après ça a fermé, ils ont trouvé ailleurs. C'est galère quand même, c'est chômage, après il faut que tu fasses une formation.

Interviewer : Ils ont retrouvé du travail où ?
Madame : Dans des entreprises, à Marseille. C'était pas tout de suite. Y'avait des programmes, apprendre à lire et à écrire, ou une formation pour apprendre un métier. Je pense qu'ils sont restés dans leurs métiers. Ça a coûté des déplacements, des déménagements. Celui de Marseille, il est resté ici. Y'en a un qui est au Canada, il est parti avant. On dirait qu'il a senti les choses bien avant. Il est bien, il a des enfants, sa femme.

Interviewer : Les gens avaient compris que les chantiers allaient fermer ?
Madame : Je sais pas. C'était un coup dur pour la ville, pour les gens. Y'a une habitude, le salaire qui tombe tous les mois, les primes. Ils étaient quand même heureux ceux qui travaillaient dans les chantiers. D'un coup d'un seul, ils se retrouvent à la maison.


Les conséquences de la fermeture des chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Vous avez ressenti ça aussi, auprès de vos élèves ?
Madame : Je parle beaucoup avec les femmes. C'est pas évident d'avoir son mari à la maison, elles me disent. Il va critiquer tout ce qu'elle fait. Il veut pas faire des choses. Il en a marre, des fois y'a des disputes. Les femmes m'ont beaucoup parlé de ça, les hommes sont un peu plus discrets. Ils se disent on va retrouver du travail.

Interviewer : Vous parliez aussi de difficultés scolaires pour les enfants ?
Madame : Je pense qu'elles étaient pas très conscientes. Elles faisaient confiance à l'école. Elles comprenaient pas trop la langue, les bulletins. Elles essayent de m'expliquer, le petit me dit que le prof c'est un raciste, je dis non, peut-être que c'est pas vrai... Des fois elles s'arrêtent juste à ce que le petit rapporte. Dans les réunions, elles comprennent pas, du coup elles y vont pas. Y'a une certaine estime qui s'est créé entre ces femmes à qui j'ai donné des cours d'alphabétisation en 89, et moi. La réussite scolaire, c'est un point commun. Je leur parle qu'il faut qu'ils aient des activités extra scolaires. Mon document final pour le DUF, il faut que je le porte sur une action de femmes qui essayent de s'en sortir et par quel moyen. Comment ces femmes qui, souvent, ont le mari à la maison, comment elles peuvent travailler, si elles savent pas bien parler le français, se débrouiller dans la vie de tous les jours. Et c'est comme ça que j'ai monté l'association Femmes dans la Cité.


L'association Femmes dans la Cité Écouter cette séquence

Madame : C'est une association que j'ai montée avec quelques femmes. Y'avait monsieur Jean-Louis Pavillon, directeur du Centre social, c'est lui qui a trouvé le nom, et monsieur Ferra Taillairi, coordinateur pour le FAS. Il m'a beaucoup encouragée, il m'a dit c'est le moment, il faut y aller. Y'a pas d'associations de femmes. Avec aussi cette difficulté des chantiers qui ont fermé, les enfants qui réussissent pas à l'école, les femmes veulent trouver une issue. Quand elles viennent en cours d'alpha, elle viennent pour parler, dire ce qu'elles ont sur le cœur, leurs projets.

Interviewer : Vous sentiez une volonté de s'ouvrir, de faire des choses ?
Madame : Oui. Y'a une certaine souffrance, y'a un manque à la maison, matériel. Elles veulent trouver le moyen pour participer. Donc il faut se former. Ça a servi à ça. On a commencé par l'alphabétisation, la couture. On était tous bénévoles au début. On a commencé tout de suite l'accompagnement à la scolarité. On n'avait pas de locaux. C'est grâce au directeur, monsieur Guglielmi, qui nous a prêté une salle à l'école Malraux pour l'alphabétisation pour les femmes et les petits. C'était le départ, et c'était la réussite.
A partir de là, la femme a trouvé un lieu où elle ose parler, dire ce qu'elle a sur le cœur, rencontrer d'autres femmes, apprendre, s'informer.
On a compris que c'est par l'économie qu'elle peut s'en sortir.
On a commencé chaque vendredi à faire des repas ensembles, après les faire goûter à des amis, ça a démarré comme ça l'atelier cuisine, qui est devenu ce que c'est devenu : le restaurant le Petit Prince. Tout petit, mais plein d'espoir.

Interviewer : C'était quoi l'espoir à l'époque ?
Madame : Faire en sorte qu'il y ait un plus pour la femme, dans les apprentissages, la façon d'être, le porte-monnaie.
Y'a eu apprendre à lire et à écrire, à passer le permis, à oser rencontrer les profs, changer d'attitude avec les petits à la maison et dans le quartier.

Interviewer : Dans votre vie personnelle, ça a été une étape importante ?
Madame : Ah oui et comment, c'est une fierté pour moi. C'est une très belle réussite. Quand je vois des femmes qui conduisent, qui travaillent, j'ai beaucoup d'amis, de connaissances, de sourires. Y'a une femme qui m'a dit un jour : « Maintenant mes enfants me respectent mieux parce que je sais lire et écrire ». Ça c'est très important.
[pleurs]


La réussite scolaire des enfants Écouter cette séquence

Interviewer : Vous avez conscience que vous êtes un modèle ?
Madame : Je suis comme toutes ces femmes, c'est tout. J'essaye de faire ce que je peux pour que ça se passe mieux pour nous ici.

Interviewer : Ça devait passer par les enfants ?
Madame : Oui, parce qu'on est sensibles, il faut que nos enfants réussissent, soient bien élevés. Moi, avec les femmes, c'est ça qui nous a le plus rapprochées. C'est quand on parle de la scolarité de nos enfants. L'enfant, son avenir, parce que c'est important.

Interviewer : Est-ce que si la réussite des enfants est si importante, c'est parce que leur vie personnelle a été sacrifiée ?
Madame : Eh oui, le fait qu'on soit là, notre vie elle est sacrifiée.

Interviewer : L'exil, c'est forcément un sacrifice ?
Madame : On veut tellement bien faire qu'on s'oublie. Quand je rentre au pays, il faut au moins que mes enfants réussissent à l'école. Il faut. C'est une vitrine, pour la mère c'est très important, c'est un devoir. Je sais pas si on peut dire se sacrifier, on doit le faire.

Interviewer : Ça justifie le fait d'être partie ?
Madame : Non, ça justifie qu'on n'a pas oublié. On est loin, mais on pense au pays, on doit faire deux choses à chaque fois, penser là-bas, penser ici. C'est un déchirement, une vie un peu bizarre. On doit pas oublier ça.
C'est pas parce que je suis pas bien, que je suis pas rentrée au pays cette année, que je dois oublier l'éducation de mes enfants, les études. Si je suis au pays, c'est plus avantageux, y'a toute la famille qui aide, un environnement qui fait que le gamin réussira plus facilement qu'ici. Mais faut pas trouver des excuses. On est comme ça, on n'est pas bien. Des fois, la réussite des enfants, inch'allah.
Quand je vois une femme, je pense que je suis pas la seule, « et les enfants, les études ? ». C'est obligé.

Interviewer : Pour cette génération d'enfants, le désir de réussite de leurs parents n'a pas été une grosse pression ?
Madame : Oui, mais comment faire ? Y'a parfois des parents qui me disent le petit réussit tout seul. Mais y'a des petits qui ont besoin d'aide. Des fois on trouve pas le temps. Il faut aussi que ces jeunes nous aident. C'est bien beau de mettre tout sur le dos des parents, le père qui n'est pas là, la mère qui sait pas lire et écrire... Il faut qu'il se bouge et qu'il travaille. Y'a pas un parent qui veut pas que son enfant réussisse.
Y'a des profs qui sont un peu dépassés, y'a aussi des problèmes dans les familles. Et puis y'a pas le relais ici. Y'a un problème, voilà, y'a un problème. Tout le monde morfle. Après, il faut aller à l'assistante sociale, c'est dur.


Le travail au GRETA dès 1989 Écouter cette séquence

Interviewer : Les années 90, qu'est-ce que vous faites ?
Madame : J'ai continué mon travail au GRETA. J'ai présidé Femmes dans la cité 8 ans. Je l'ai créée en 93. On a eu le local en 95, que j'ai pas pu inaugurer parce que j'étais en train d'accoucher de mon fils. En 2001, j'ai dit qu'il faut que je m'occupe plus de mes enfants, ma maison, mon travail. J'ai plus privilégié mon travail et l'association.

Interviewer : Comment elle fonctionnait ?
Madame : On a un CA, un bureau, des salariés, y'avait du monde, des femmes qui étaient bien, qui pouvaient continuer, c'était important de changer un peu. Quand j'ai laissé l'association, y'avait des petits contrats, pas beaucoup d'heures, mais du monde, et beaucoup de bénévoles. C'était le moment de passer à autre chose. Mes enfants allaient passer leur bac, il m'a fallu m'occuper du petit.

Interviewer : Professionnellement, comment vous avez évolué ?
Madame : J'ai continué le travail auprès de femmes et jeunes au GRETA. Ils viennent faire une remise à niveau en français math, et des stages en entreprise, je fais le suivi.

Interviewer : En quelle année vous avez été embauchée par le GRETA ?
Madame : En octobre 89. Je faisais des vacations et je continuais à Sainte Musse. Quand j'ai pu avoir mon contrat à plein temps en 92, j'ai tout quitté et je suis restée ici au lycée Langevin, au GRETA.
Maintenant, on n'a que des jeunes, 16-25 ans, on n'a plus d'adultes, c'est dommage. On travaillait beaucoup sur le projet personnel professionnel, c'était important.


L'association Espace solidarité Écouter cette séquence

Interviewer : Comment s'est rééquilibrée votre vie quand vous avez quitté la présidence de l'association ?
Madame : Plus de présence, plus souvent à la maison, à l'écoute, disponible. Y'a pas longtemps, on a monté cette association Espace solidarité, dans mon quartier, pour qu'il y ait un espace dans ce quartier pour les habitants. On a commencé à faire l'accompagnement à la scolarité. Il y a beaucoup de personnes âgées, il y a beaucoup d'aide à la personne, mais aussi santé.
Il y a des permanences d'accueil, ce sont les bénévoles qui viennent, on n'a pas de permanents.
On compte beaucoup sur les contrats aidés, on n'a pas beaucoup de moyens. On a failli avoir un CAE. En septembre, certainement.

Interviewer : Quelle différence vous ressentez dans la vie de la ville entre la création de ces deux associations ?
Madame : C'était en 2006. Dans le temps, en 93, y'avait pas d'associations de femmes, donc c'était une première. On a été soutenus, on nous a beaucoup aidés pour monter le projet, le DSU, la municipalité.
Là, maintenant, j'ai monté cette association avec des amis, et c'est pareil, ici il n'y a pas d'associations du tout, dans le quartier la Rouve. Donc, pareil, on répond à un besoin, on est soutenus, par les habitants, et surtout la nouvelle municipalité. Y'a toujours une réponse, une écoute.


La Seyne aujourd'hui Écouter cette séquence

Interviewer : Le malaise qui a suivi la fermeture des chantiers, aujourd'hui il a disparu ?
Madame : Je sais pas. Je pense qu'il va jamais être estompé, non. Je ne pense pas, parce qu'on a fermé ça, y'a eu des mesures... y'a eu plus de travail peut-être dans le bâtiment.
Peut-être maintenant, avec la construction d'un hôtel, et le nouveau port, ça va créer beaucoup d'emplois et changer un peu la ville. Ça va créer autre chose, les gens vont plus se retrouver.

Interviewer : La reconversion vers le tourisme, ça peut marcher ?
Madame : Je pense, oui. Y'a toute cette beauté de paysages, y'a de quoi faire.

Interviewer : Vous vous souvenez de la destruction du site des chantiers ?
Madame : Ben oui, ça fait mal.

Interviewer : Pourtant votre mari n'y avait pas travaillé ?
Madame : Son père était là-bas, ses frères, ses amis, ils vivaient du chantier. Même pour nous, c'était devant nous, on a cette habitude, cet attachement.
On a vu la rotonde, malgré le fait qu'il y a eu des associations qui étaient là pour pas que ça tombe, ça a été détruit quand même.
On va garder un peu espoir et se dire que ça ira mieux. Peut-être que ça fait partie de la vie...


Les projets du témoin Écouter cette séquence

Interviewer : Pour les prochaines années, pour vous, quels sont les projets, les envies ?
Madame : Peut-être vendre ma maison et acheter une petite maison à la campagne. Marier mes filles, des petits enfants, et voilà. Rentrer un peu plus souvent au pays, profiter de ma mère, parce que j'ai perdu mon père en 2005, je l'ai pas beaucoup vu. Je veux aller plus souvent au pays. J'ai culpabilisé, j'ai dit j'aurais dû y aller plus souvent.

Interviewer : Est-ce que vos parents sont déjà venus vous voir en France ?
Madame : Oui, mon père venait au moins deux fois par an pour me voir. Il sait que moi j'ai mon travail, mes enfants, c'était plus facile pour lui. Et il aimait bien venir, il achetait ses chaussures ici.

Interviewer : Et votre mère ?
Madame : Non, il faut qu'elle reste à la maison, qu'elle s'occupe de son intérieur, des filles, des petits enfants. Elle y pense même pas. Il faut pas qu'elle quitte la maison. Elle est venue quand mon père est décédé, elle est restée un mois ici. Là bas, elle est entourée de mes frères et sœurs, c'est sa vie.
J'ai beaucoup insisté pour qu'elle vienne, ça m'a fait du bien, on est allées visiter là où mon père allait.
Là je lui dis de revenir, elle veut pas. Elle dit tes enfants sont grands, tu dois venir. Elle a raison.
On est pris par des obligations, il reste que les vacances, en août et c'est pas suffisant. C'est comme ça.
Pour moi, au moins deux ou trois fois par an, surtout quand les parents sont âgés, ils ont besoin de nous voir. Nous aussi on a besoin, de rattraper le temps on peut pas, mais d'être à côté d'eux. Toutes ces années, on rentre que l'été, un peu chez la famille, un peu les mariages, un peu la plage, en fait on reste pas beaucoup avec nos pères et mères.

Interviewer : Aujourd'hui vous avez envie de vivre à la campagne ?
Madame : Oui, revivre mes rêves d'avant, planter, avoir un petit jardin.

Interviewer : Votre mari vous suivrait ?
Madame : Oui. C'est la maison, c'est moi. L'extérieur, c'est lui. Et il veut toujours me faire plaisir, ce serait pas difficile.
Et rentrer plus souvent au pays, profiter de ma mère, de mes frères et sœurs, de mon pays. Parce que m'installer là-bas, je sais pas. J'ai mes enfants quand même ici. On a ce... on est un peu là-bas, un peu ici. On doit continuer à vivre comme ça jusqu'à la fin.

Interviewer : Vous aviez déjà été interviewée par Andrée Bensoussan en 2000, est-ce que vous avez changé entre ces deux interviews ?
Madame : Oui. Y'a eu le décès de mon père, de mon beau-père, le décès d'une amie, ça m'a marqué.
Y'a une autre vision sur cette vie, sur le quotidien, les gens, les valeurs, ça a beaucoup changé.
Maintenant je donne plus d'importance à l'instant que je vis. La vie en famille, j'essaye de passer plus de temps avec mes proches.

Interviewer : Vous vous souvenez de cette interview, qu'est-ce que ça avait provoqué en vous ?
Madame : C'était plus un parcours de vie et de réussite. J'ai parlé surtout de l'association, de ma réussite professionnelle et aujourd'hui je parle un peu de tout, les choses qui m'ont fait mal, mes projets. C'est plus réfléchi aujourd'hui.
J'étais plus jeune aussi, j'ai 50 ans, c'est l'âge de la raison.
Ce que j'ai dit, je l'ai dit avec toute l'émotion qui est en moi, ma spontanéité.


La découverte du milieu associatif, communiquer entre femmes Écouter cette séquence


Bénévole puis vacataire, une reconnaissance Écouter cette séquence


Les formateurs Écouter cette séquence


Les activités pour les enfants Écouter cette séquence


Les difficultées liées à la fermeture des chantiers en 1989 Écouter cette séquence


Le centre culturel de Berthe Écouter cette séquence


Fière d'obtenir mon diplôme Écouter cette séquence


Le soutien du mari Écouter cette séquence


Enseigner aux hommes désireux d'apprendre à lire Écouter cette séquence


Des formations spécifiques pour les femmes Écouter cette séquence


Le projet associatif, les actions Écouter cette séquence


L'association a pris de l'ampleur Écouter cette séquence


De l'atelier cuisine au restaurant Écouter cette séquence


L'association La Vie et l'association Le Petit Prince Écouter cette séquence


La démission, le positivisme Écouter cette séquence


La reconnaissance Écouter cette séquence


Le but atteint de l'association Femmes dans la cité Écouter cette séquence


Des habitudes masculines modifliées Écouter cette séquence