Accueil > Etre femme et immigrée à l'époque de la construction navale à la Seyne-sur-Mer > Fille d'un charpentier de marine des chantiers de 1948 à 1973
Qualité du son : bonne
Interviewer : Bonjour Marie-France. Pour commencer est-ce que vous pourriez vous présenter ?
Madame M F : Bonjour, je m'appelle Marie-France ... et je suis née le 2 février 1948 à Ollioules. J'avais 15 jours lorsque mes parents se sont installés à La Seyne, dans le quartier de la Rouve.
Interviewer : Vos parents étaient-ils originaires de La Seyne ?
Madame M F : Non, mes parents étaient originaires d'Alsace. Mon père est venu en 1932, il avait travaillé sur le barrage de Kembs, puisqu'il avait un CAP de menuisier. Il travaillait dans le bâtiment comme coffreur. Ne trouvant pas de travail, il est venu à Toulon parce qu'il avait un frère qui avait fait son service militaire dans la marine. C'est son frère qui lui a dit : « mais viens à Toulon, viens dans le midi ». Donc, il est venu à Toulon, il y a travaillé. Il a travaillé quelques mois, en 1936, aux chantiers de La Seyne, mais il y a eu un moment où il a eu des difficultés et comme il était célibataire, il s'est retrouvé débauché des chantiers.
Il a rencontré ma mère en retournant en Alsace quelques jours chez sa mère, qui habitait le même immeuble que les parents de ma mère. En 1939, ma mère a rejoint mon père à Toulon. Puis il y a eu la guerre. En 1948, en venant à La Seyne, mon père est rentré aux Chantiers et il est resté aux Chantiers jusqu'à l'âge de la retraite, c'est-à-dire jusqu'en 1973.
Interviewer : Quand il est arrivé à La Seyne c'était à brûle-pourpoint, ou il avait eu un coup de main pour s'installer ?
Madame M F : C'est-à-dire qu'avant d'entrer aux chantiers, en 1948, il travaillait déjà à La Seyne.
Au début de l'année 48, mes parents habitaient encore à l'Escaillon, à l'Ouest de Toulon. Papa travaillait chez un menuisier à La Seyne, monsieur G. Ce monsieur avait sa mère qui habitait une maison chemin des Mouettes, donc à la Rouve. Cette maison était divisée en deux. Elle avait d'un côté trois pièces où sa mère, qui était une vieille dame, vivait et de l'autre côté, il y avait la deuxième partie que mes parents ont louée. On a vécu dans cette maison, on était à l'étroit, il n'y avait juste qu'une ancienne véranda aménagée en cuisine, une salle de séjour et une chambre. On s'y est installé au milieu du mois de février parce que je sais que j'étais tout bébé. J'ai été baptisée fin février à l'église de La Seyne et mes parents étaient déjà installés.
Après il a pu se faire embaucher aux chantiers. Il a préféré rentrer aux chantiers que de rester chez l'artisan menuisier.
Interviewer : Quand vous vous êtes installés à la Rouve, vous étiez deux filles ?
Madame M F : On était deux filles, j'avais ma sœur M de 8 ans mon aînée et moi. 5 ans plus tard, est née ma deuxième sœur, dans la maison que nous habitions parce que, souvent, les femmes accouchaient à domicile.
Interviewer : Pendant la deuxième guerre mondiale, votre père travaillait encore chez monsieur M ?
Madame M F : Il travaillait dans d'autres entreprises. La seconde guerre mondiale, ça a été un petit peu chaotique parce qu'il travaillait dans des entreprises qui avaient des liens avec l'Arsenal.
Il y a eu une époque où mon père m'a parlé de l'Arsenal. Je ne sais pas trop comment il a été embauché mais je sais qu'il y a travaillé. Puis quand les allemands ont occupé le Sud de la France en 1942, il a été convoqué à la police française, à la Kommandantur. Étant d'origine alsacienne, ayant été réintégré dans la nationalité française par le traité de Versailles, il était certain qu'il serait mobilisé dans l'armée allemande. A ce moment là, il a quitté Toulon. Il a rejoint ma mère dans le Gers, qui s'était déjà réfugiée auprès de ses parents. En 1940, les Alsaciens ont quitté l'Alsace.
Pour protéger les civils, ils ont été envoyés dans différentes parties de la France. De la ville de St Louis, d'où maman était originaire, les gens ont été envoyés dans le Gers. Mes grands-parents habitaient un petit village, Saint-Mézard. Maman avait rejoint ses parents là-bas et quand les allemands sont arrivés, papa les a rejoint. Il a quitté Toulon et en quelque sorte, il s'est caché des allemands pour ne pas être mobilisé dans l'armée allemande.
Il a réussi à éviter cet enrôlement parce qu'il aurait pu devenir "malgré-nous". Il avait cependant des enfants, mais il aurait pu être envoyé dans l’armée donc se retrouver du mauvais côté, en quelque sorte. Ils sont restés dans le Gers jusqu'en 45. En 45, ils ont pris la décision de revenir à Toulon.
Interviewer : Il a tout juste eu le temps de voir le sabordage de la flotte française à Toulon et après de partir dans le Gers. Vos deux parents, officiellement, quand ils sont nés, ils étaient de nationalité allemande ?
Madame M F : Ah oui, papa est né en Suisse, parce que ma grand-mère paternelle donc sa mère était suisse et mon grand-père, qui était né en Alsace, avait quitté l'Alsace parce qu'il n'avait pas voulu servir dans l'armée allemande.
Au lieu de gagner la France, de gagner l'intérieur comme disent les alsaciens, c'est-à-dire le reste de la France ou de partir en Algérie, comme beaucoup d'alsaciens, lui il est parti en Suisse et c'est là qu'il a rencontré ma grand-mère. Ensuite, ils ont vécu au Sud de l'Allemagne, dans une petite localité, Singen et ils sont revenus en Alsace, après la première guerre mondiale, dans le village originaire de la famille G. C'est-à-dire un petit village qui s'appelle Bischwiller, qui est dans une vallée vosgienne.
Quant à ma mère, elle est née le 5 août 1914, c'est-à-dire exactement deux jours après la déclaration de guerre de l'Allemagne contre la France. Elle est née à St Louis, au Sud de l'Alsace, la frontière de la Suisse et de l'Allemagne. Sur son certificat de naissance c'est écrit en allemand. Mes parents sont nés allemands. Ils ont été réintégrés par le traité de Versailles, le certificat de réintégration date de 1925. Le traité de Versailles qui a été signé le 28 juin 1919.
Interviewer : Revenons un peu quand votre père a commencé à travailler aux chantiers, donc j'imagine que comme il était menuisier-charpentier de formation, il a travaillé dans cette branche là. Qu'est-ce qu'il a fait quand il a commencé réellement aux Chantiers ?
Madame M F : Mon père travaillait à la construction des coques de navires. Il était charpentier de navire, il était aussi traceur. Ce dont je me souviens le plus, c'est qu'il avait une spécialité. J'ai toujours connu mon père me parlant des tirants d'eau. C'est lui qui était chargé de tracer ces lignes de chiffres qui sont sur les coques et qui permettent de savoir à quelle profondeur se trouve le navire. Il en est devenu, en quelque sorte, le grand responsable.
Les ingénieurs, les contremaîtres n'avaient pas besoin de vérifier son travail. Il maîtrisait parfaitement sa tâche.
Je me souviens qu’il nous racontait quand il y avait l'ingénieur Véritas qui venait. Je ne sais pas si c'est Véritas ou le représentant de la Lloyds, des grandes assurances. Il venait vérifier la taille des navires, la hauteur et c'est lui qui accompagnait l'ingénieur pour cette vérification des mesures du navire avant les lancements de bateaux.
Interviewer : Pour tracer les lignes d'eau par rapport aux différents niveaux de charge.
Madame M F : C'était un travail qui demandait une certaine technicité, un savoir faire précis, c'était un travail difficile, parce que aussi bien par la chaleur que par le froid. Quand le navire était à flot, il re-vérifiait. Il me racontait qu'il était sur un petit esquif tout autour du navire.
Ce qu'il y a aussi c'est qu'il participait quand il y avait les lancements de navires, il était de ceux qui abattaient les grandes épontilles qui soutenaient la coque. Il était de tous les lancements de navires et nous on allait assister à ces lancements. Effectivement le lancement du navire c'était un temps fort dans la vie des chantiers voire dans vie de la ville. Il y a eu un lancement l’El-Djezair où les conditions météorologiques étaient telles qu'ils en ont été récompensés, il a reçu une médaille pour ce lancement.
Interviewer : Est-ce qu'il vous a raconté s'il a participé à la reconstruction des chantiers juste après la guerre, parce qu'en fait quand il est arrivé aux chantiers, il y a quasiment tout qui était démoli par les mines disposées par les allemands et qui ont explosé juste à leur départ ?
Madame M F : Je ne sais pas, j'en ai jamais entendu parler, de juste l'après guerre, non. J'ai souvenir à partir de 1956-58, j'avais 7-8-10 ans, donc là j'ai souvenir du travail de mon père, avant non, j'étais trop jeune.
Interviewer : Donc l'El-Djézair, je crois que c'était un paquebot qui a été lancé dans les années 50.
Il a connu la transition entre les Forges et Chantiers de la Méditerranée et les constructions navales industrielles méditerranéennes puisque les Forges et Chantiers ont fermé en 66.
Est-ce que pour lui ça a été un changement notable ou est- ce que finalement c'était juste une reprise ?
Madame M F : Ah non, dans son travail, je n’ai pas ressenti chez lui de changement.
Peu importe le nom de l'entreprise, pour lui c'était le travail qu'il devait faire. Il a continué à travailler sur les navires. Il me semble que le dernier navire c'était le paquebot le Sagafyord. Il n’y a pas eu de changement, son travail était le même.
Interviewer : Dans la construction navale… c'est souvent en dents de scie, c'est-à-dire qu'il y a des moments de piques où il y a beaucoup de constructions, ça c'était juste après la guerre puis en début des années 60, il y a eu un certain creux, c'est pour ça finalement que les Forges et Chantiers ont fermé. Est-ce que ça s'est ressenti au niveau de votre quotidien ?
Madame M F : Je sais qu'en 66, il y a eu une période de grandes tensions. Il y a eu des grèves, des manifestations, ça a été un moment très délicat. C'est vrai qu'au niveau de la famille, au niveau des parents, mon père était peu engagé sur le plan syndical, donc là je n'ai pas trop vécu ces grands moments. Il faisait grève, mais bon souvent il restait à la maison. Il participait, mais il était peu impliqué dans cette action. Il faut dire que mon père avait un état d'esprit des ouvriers attachés à l'entreprise, un peu XIXème siècle parce qu'on obéissait au patron. Il avait un peu cette attitude. Il n'était pas un combattant.
Interviewer : Est-ce que vous avez connu des copains à lui qui travaillaient aux chantiers, est-ce que votre mère et ses trois filles ont eu des relations avec les amis qu'il avait aux chantiers ?
Madame M F : Il avait assez peu d'amis. C'était quelqu'un d'assez taciturne, assez replié sur lui-même.
On avait les voisins, ils travaillaient tous aux chantiers. On a été les premiers de ce quartier, entre la Rouve et Balaguier, quand en 56, où ils ont construit leur maison, ils ont emménagé. Sur six voisins, il y en avait cinq qui travaillaient aux chantiers, alors ils avaient des relations avec le voisinage mais ils avaient peu d'amis sur les Chantiers.
Interviewer : Est-ce qu'il lui arrivait de travailler en dehors des chantiers ?
Madame M F : C'était un grand bricoleur.
Interviewer : Si j'ai bien compris, d'ailleurs, c'est lui qui a construit votre maison à Balaguier.
Madame M F : Il a construit lui-même sa maison. Il a construit tous ses meubles. Il m'a construit des meubles, j'ai un bahut dans ma salle de séjour, d'ailleurs c'est le dernier meuble qu'il ait fabriqué puisqu'il était déjà malade quand il l'a réalisé. Donc, il bricolait pour des amis parce qu'on était trois filles, maman ne travaillait pas. Il fallait faire tourner le ménage. Certes, il avait le niveau d'ouvrier hautement qualifié, il était P3 et puis il a reçu le titre de maître ouvrier, pour un ouvrier il avait un salaire satisfaisant. Mais c'était pas facile d'élever ses enfants, donc il fallait un petit peu bricoler, il bricolait beaucoup.
Interviewer : Ça signifie quoi exactement P3 ?
Madame M F : C'était un niveau de qualification de l'ouvrier. Je ne sais pas exactement il y avait le P1, P2, P3.
Interviewer : Et au-dessus de P3 ?
Madame M F : Après, au dessus de P3, on devenait chef d'équipe et puis contremaître. Mon père n'était pas quelqu'un qui allait s'investir. Or, j'ai souvent entendu dire et surtout par ma mère, que passer au niveau de chef d'équipe ou de contremaître ce n’était pas toujours sur la qualification professionnelle, mais c'était souvent par un jeu d'influence, de relations. Et là, mon père il n'était pas question qu'il s'abaisse à ce genre de pratique. Il était droit, il était raide. Il avait des principes. Il n'était pas question qu'il déroge. Il préférait rester à son niveau de P3 plutôt que de louvoyer et d'obtenir un niveau de qualification… il aurait mérité d'être contremaître… il y avait des gens qui réussissaient à intriguer pour avoir ces avantages.
Interviewer : Finalement, il n'a jamais regretté d'être resté P3 ?
Madame M F : Non, il avait quand même un salaire correct. Il a aussi souvent fait des heures supplémentaires pour arrondir le salaire. C'était un très grand travailleur.
Interviewer : Apparemment, il faisait beaucoup d'heures supplémentaires… ?
Madame M F: Ça voulait dire de faire une heure de plus le soir, au lieu de sortir à 18h15, il sortait plus tard. C'était quand il ne travaillait pas, le samedi matin, il y allait. C'était souvent faire des nuits, parce qu'il pouvait travailler la nuit et c'était payé double. Dés qu'il pouvait faire des heures supplémentaires il les faisait.
Interviewer : Et en dehors du nombre d'heures de travail, est-ce que ce travail était pénible ou fatiguant pour lui, est-ce que ça s'est ressenti ?
Madame M F : Je pense qu'il y a la pénibilité du bruit pour tous les ouvriers des chantiers et, sur la fin de sa vie, il avait largement perdu des capacités auditives. Il y avait aussi des risques d'accident. Une fois il a failli y rester parce qu'il y avait une grue qui montait l'échafaudage où il travaillait le long de la coque des navires et il y a un câble qui a cassé et, heureusement pour ses équipiers, ses matelots comme il les appelait, ce n’était pas très haut, ils devaient être à peine à deux mètres que l'échafaudage est tombé. C'était un métier très dangereux sur les échafaudages, il risquait à tout moment l'accident et c'est ce qui a failli se produire.
Interviewer : C'était le seul vraiment incident qu'il y a eu… ?
Madame M F : C'est celui dont je me souviens.
Interviewer : Est-ce que votre père participait aux activités du comité d'entreprise ?
Madame M F : Non, mon père n'avait pas d'activité sportive. Il restait chez lui, il ne sortait jamais, il bricolait.
Par contre, on a bénéficié de toute la politique des comités d'entreprise, c'est évidemment à Noël. On recevait un cadeau et puis il y avait la séance de cinéma avec le goûter au Rex, où se trouve actuellement la librairie Charlemagne.
Tous les enfants avaient la séance de cinéma, parce qu'à l'époque on n'allait pas beaucoup au cinéma, donc rien que d'avoir la séance gratuite, une après-midi récréative au cinéma, c'était quelque chose d'extraordinaire.
On recevait des jouets ce qui améliorait quand même la situation, parce que je me souviens qu’en 53 ou en 54, comme ils avaient entamé la construction de leur maison et bien on était un peu limité. J'ai souvenir d'avoir reçu comme cadeau de Noël de mes parents une corde à sauter, mais j'étais pleinement heureuse de l'avoir.
Je le vois maintenant avec le recul, mais ce n'était pas une privation parce que je n'avais pas beaucoup de choses matérielles, mais j'avais plus que le matériel. J'avais la richesse d'être aimée, d'avoir des repères familiaux parce que mes parents étaient de simples ouvriers de chantier. Ils vivaient modestement, les fins de mois étaient difficiles, bien souvent, mais on nous a donné des repères. On sait ce qu'est la valeur des choses. On connaît le respect des autres et ça, ça a été une richesse extraordinaire.
Puis ils ont tout fait pour qu'on sorte de cet état de la classe ouvrière et qu'on essaie de monter dans la hiérarchie sociale. Ils ont tout fait pour qu'on travaille à l'école et qu'on réussisse.
Le jour où je suis entrée dans l'éducation nationale, je suis devenue fonctionnaire parce que pour mes parents, être fonctionnaire c’était vraiment le bâton de maréchal, là je leur ai apporté beaucoup.
Le comité d'entreprise avait aussi un centre de colonie de vacance. J'y suis allée deux ans. Là aussi, ils construisaient la maison, on n'avait pas de vacances. En 56, on est allé ma mère, mes sœurs et moi chez mes grands-parents en Alsace, ce qui a été pour moi le premier grand voyage, ça a été extraordinaire. Mon père est resté parce qu'il avait la maison à construire. Il a passé ces trois semaines de congé à construire la maison. Il nous a envoyées en Alsace pour qu'on aille voir les grands-parents. Les autres fois, je suis allée en colonie de vacance pendant trois semaines, à Gréoux-les-Bains parce qu'ils avaient [les chantiers] un petit château à l'extérieur du village.
Interviewer : Quand vous parliez de vos parents qui désiraient vous voir monter dans l'échelle sociale, est-ce qu'à un moment ils envisageaient de vous pousser à aller travailler, comme le faisait votre père, aux chantiers ?
Madame M F : Ah non, pour eux c'était rentrer dans la fonction publique, avoir la sécurité de l'emploi. Ce qui était important c'était de travailler, de nous aider à réussir à l'école, la réussite scolaire c'était pour eux très important.
Interviewer : Et qu'ont fait vos sœurs ?
Madame M F : Ma sœur aînée, à 19 ans, elle a passé le concours pour entrer dans les Postes. Donc elle est partie à Paris. Après, elle est revenue à Digne-les-bains, où elle a eu sa mutation. Là, elle a rencontré mon beau-frère qui travaillait aussi dans les Postes. Moi je suis rentrée dans l'éducation nationale, en tant que professeur d'Histoire-géographie. Ma jeune sœur s’est présentée au concours de la sécurité sociale, là elle y a travaillé. Puis dans un groupe de culture provençale animé par le père Comte qui était le curé de la paroisse de Mar-Vivo, c'était "l'Escole de la Souco". Là, ma sœur a rencontré son mari qui après avoir passé un BTS est devenu technicien aux chantiers. Il y a eu une période où mon père et mon deuxième beau-frère ont travaillé ensemble aux chantiers.
Interviewer : Ils travaillaient dans le même service ?
Madame M F : Non, je ne sais pas dans quel service il travaillait, il n’est pas resté longtemps aux chantiers puisque très vite, après leur mariage, mon beau-frère a suivi une formation pour devenir ingénieur. Il a passé le concours pour entrer dans une école qui s’appelait le CESI, à Lyon. Il a réussi le concours d’ingénieur et là il a eu l’opportunité de rentrer dans l’Arsenal de Toulon. Il a quitté les chantiers pour entrer dans l’Arsenal de Toulon, avant que les chantiers de La Seyne ne ferment leur porte. Je crois qu’il est rentré en 79. Cette année là, il avait la possibilité de rentrer dans une entreprise américaine qui était installée à La Gaude, dans les Alpes Maritimes et il devait partir aux États-Unis. C’est dans le train qu’il a rencontré un ingénieur et il a eu une opportunité de rentrer à l’Arsenal. Il est rentré, à la grande joie de ma mère, qui avait déjà deux petites-filles de sa dernière fille et qui les voyait partir, ça lui avait, ce n’est pas qu’une image, ça lui avait fendu le cœur. Ça l’avait rendue presque malade de voir partir son gendre, sa fille et surtout les deux petites-filles qui venaient tout juste de naître. Du coup ils sont restés à La Seyne.
Interviewer : Lorsque votre père a quitté les chantiers en 73, est-ce qu’il a continué à suivre un petit peu ce que faisaient les Chantiers ?
Madame M F : Non, dès l’instant où il est parti à la retraite, le monde du travail ne le préoccupait plus. Il avait gagné un repos bien mérité. Sa vie avec son épouse, ses enfants, ses petits-enfants. De sa fille aînée il a eu deux garçons. Sa fille aînée a passé une grande partie de sa vie dans la région parisienne à Longjumeau. Comme ils étaient dans la région l’été, les enfants descendaient dans le midi pour les vacances. Ils se sont occupés pendant les vacances de leur deux petits-fils, puis après les autres petits-enfants. La grande préoccupation était de s’occuper des petits-enfants et de faire des petits voyages, pour un peu profiter de la vie.
Interviewer : Ils ont eu l’occasion de retourner quelques fois en Alsace ?
Madame M F : Oui, plusieurs fois. Le premier grand voyage où on était toute la famille, c’est en 1958. La maison était construite. On était un tout petit peu plus à l’aise, il n’y avait plus de loyer. Il y avait un remboursement de prêt mais ce n’était pas énorme. On est partis tous les cinq chez les grands-parents. On avait emmené les bicyclettes et, tous les matins, on allait faire une promenade autour de la ville de St Louis. Ces vacances là sont certainement les plus belles vacances d’été que j’ai eues. Les autres étaient bien aussi mais celles-là ont eu une saveur extraordinaire parce qu’on partait vraiment pour la première fois toute la famille en vacances.
Interviewer : Donc il est parti en 73, à un moment où les chantiers ont connu une période assez prospère. Il a terminé sa carrière ou il est parti un petit peu au moment où il l’a souhaité ?
Madame M F : Il est parti au moment où il l’a souhaité. Il aurait pu partir à 60 ans et il a prolongé un petit peu parce qu’il avait ses deux dernières filles. Nous faisions des études, ça coûtait de l’argent. On avait certes des bourses, on avait la chambre à la cité universitaire, on travaillait l’été pour faire un petit peu d’argent, mais ça représentait quand même, pour mes parents, une somme importante.
Tant qu’on a fait nos études, il a travaillé. Dés l’instant où on a réussi et qu’on avait un emploi, à ce moment là il a pu s’arrêter et vivre avec la retraite.
Interviewer : Il a attendu que vous soyez casées, en quelque sorte ?
Madame M F : Voilà, à partir de là il est entré dans cette période qui a duré une douzaine d’années puisqu’en 85 il est décédé de problèmes pulmonaires, d’un cancer. On se demande dans quelle mesure il n’a pas été touché par le problème de l’amiante mais, à l’époque, on n’avait pas encore soulevé cette question. Il est décédé à l’âge de 74 ans.
Interviewer : En fait, il y a quelques doutes que l’amiante soit liée à ses problèmes pulmonaires.
Madame M F : On peut penser, on se pose la question. Évidemment, on n’a aucune réponse. Certainement ça a dû jouer un peu.
Interviewer : Donc votre père est né en 1911, décédé en 1985. Autrement dit, il n’a pas connu la fin des chantiers ?
Madame M F : Non, il n’a pas connu et puis pour maman, elle est décédée à une date presque symbolique, puisque je sais que les chantiers ont fermé le 28 février 1989 et elle est décédée le 5 mars 1989. Mes parents sont partis en même temps que les chantiers, comme s'ils étaient morts avec les chantiers. Pour moi, les dates ont une dimension symbolique forte.
Interviewer : Est-ce que finalement ça a un côté négatif cette simultanéité ou est-ce qu’au contraire vous pensez que c’est peut-être mieux qu’ils n’aient pas connu la fin de ces chantiers ?
Madame M F : Pour mes parents je ne sais pas, je ne peux pas répondre. Pour moi, c’est le drame de la ville, c’est lié à la mort de mes parents et lié à la mort de la ville où les chantiers sont morts, avec mes parents. Dans mon esprit, c’est très lié cette situation. C’est un fait tout à fait naturel, c’est ça, c’est comme ça. Dans ma perception, dans ma représentation, il y a une force symbolique considérable.
Interviewer : Par contre, jusqu’à sa retraite il a travaillé uniquement dans la partie construction navale des CNIM ? Il n’a pas eu l’occasion de travailler dans les escaliers mécaniques, ni dans la fabrication des tubes… ?
Madame M F : Non, toujours sur les coques des navires. Oui alors, toujours il traçait les tirants d’eau. Son travail c’était ça.
Interviewer : Est-ce que votre vie quotidienne était influencée, d’une manière ou d’une autre, par l’activité des Chantiers ?
Madame M F : Oui la vie de la ville, la vie du quartier étaient rythmées par les sonneries, par la sirène des chantiers qui était vraiment le son des chantiers. Le matin, on voyait passer les ouvriers. D’abord on les voyait passer à bicyclette, puis après il y a eu le Solex, le vélomoteur.
Mon père avait un Solex pour aller travailler aux chantiers, puisqu’il y avait quand même deux kilomètres de parcours pour chaque aller-retour. Il partait le matin et revenait à midi. Il mangeait à la maison, il ne mangeait pas à la cantine, puis il repartait pour une heure et quart. On entendait la sirène qui marquait la reprise du travail. A six heures et quart c’était la sirène de la sortie. On voyait passer les ouvriers, on voyait rentrer les voisins de leur travail.
La plupart revenaient avec leur Solex. Dans le quartier c’était le véhicule des travailleurs des chantiers.
Interviewer : Quand il y avait la sirène, par exemple le matin, le but était d’indiquer aux travailleurs qu’ils devaient partir et se rendre aux chantiers, ou est-ce que ça signifiait qu’on commençait le travail et qu’il devaient déjà être là ?
Madame M F : Ils devaient être dans les chantiers et être prêts à commencer le travail. Papa, il partait bien sûr avant. Il devait y avoir dix minutes, un quart d’heure pas plus pour rejoindre son travail.
Interviewer : Le soir, la sirène indiquait le moment où l’on pouvait interrompre le travail, donc on arrivait un peu avant et on partait un peu après la fameuse sirène. Par rapport au fait qu’il ne mangeait pas à la cantine et qu’il mangeait chez vous, est-ce qu’il y avait une osmose entre sa vie aux chantiers et sa vie familiale, ou est-ce qu’il y avait une distinction ?
Madame M F : Je pense que, pour lui, il y avait le temps du travail et le temps de la maison. Sa vie a été limitée entre le lieu de travail et la maison, puisqu’il restait à la maison. Il sortait très peu. C’était un homme assez replié sur lui-même. Il passait ses journées de liberté dans son petit atelier de menuiserie qu’il avait aménagé au rez-de-chaussée de sa maison. C’était son univers.
Interviewer : Dans votre quartier, il y avait essentiellement des maisons individuelles, il y avait assez peu d’immeubles.
Madame M F : Jusqu’à la fin des années 60, il n’y avait que des petites maisons. Il y avait la grande propriété qui appartenait à la famille Scaglia. On était limitrophe du grand champ de vignes de la propriété. A partir de là, il y avait des maisons individuelles avec un petit carré de jardin, ça ne dépassait pas 300 – 350m². Les jardins étaient entièrement cultivés, essentiellement de légumes. Il y avait les arbres fruitiers, c’était vraiment la culture intensive. Il y avait aussi un poulailler avec quelques poules et lapins. Tout cela permettait de se nourrir en grande partie. C’était aussi un petit apport non négligeable.
Interviewer : Ça permettait de ne pas à avoir acheter certaines denrées.
Madame M F : Légumes, fruits. On avait une qualité de nourriture qui est difficile de retrouver aujourd’hui, même avec l’agriculture biologique. Les poulets qu’on mangeait le dimanche, ça serait aujourd’hui des produits de luxe. Les poules étaient nourries avec les déchets de nourriture, les épluchures… puis du blé, du maïs, du son, de la repasse. On allait acheter ces produits, en général, le samedi après-midi, dans un magasin qui se trouvait à côté de la pharmacie mutualiste. Il est aujourd’hui occupé par la quincaillerie Razanti, à l’extrémité de la rue Berne et c’était la famille Merlot. On allait acheter nos dix kilos de blé, nos dix kilos de repasse pour les lapins.
Tous les matins maman préparait la pâtée des lapins, des poules. A midi, je me souviens, quand c'était l’été, elle découpait la peau des melons pour la jeter aux poules. Elle achetait à la triperie des produits de basse gamme, genre mamelle de vache ou autre, qu’elle découpait en petits morceaux pour donner de la viande aux poules.
Quand il y avait la pluie, on allait ramasser les escargots pour les nourrir et le soir elle donnait les graines. On avait vraiment des poules élevées en plein air, même si c’était un espace réduit, et puis nourries avec des produits très diversifiés, ce qui donnait une qualité de viande... Il y avait donc le poulet-frites, c’était presque un repas de dimanche. De temps en temps il y avait la poule, quand il y avait une vieille poule, elle la tuait. Elle la faisait cuire, une partie on la mangeait et l’autre partie avec le fond de volaille, avec cette sauce de poule elle préparait les risottos, ça m’en donne l’eau à la bouche.
Interviewer : La fameuse triperie, elle se trouvait à La Seyne ?
Madame M F : Maman avait l’habitude d’aller faire ses courses à Toulon parce qu’elle estimait que le marché de Toulon était beaucoup moins cher que le marché de La Seyne. Elle prenait son bus deux fois par semaine, le mercredi et le samedi matin. Elle avait son circuit, elle passait par la grande surface qui se trouvait à côté de la place Puget qui s’est appelée Toulona, puis Monoprix ou alors un peu avant Bertrand elle faisait ses courses d’épicerie. Après elle allait au marché parce qu’on arrivait quand même pas à produire tout ce dont on avait besoin, puis elle reprenait son bus et elle rentrait à la maison. C’était un peu pour maman ses sorties de la semaine parce qu’elle restait à la maison.
Interviewer : Le marché, c’était celui du Cours Lafayette ?
Madame M F : Oui, là elle avait ses revendeuses habituelles, elle ne choisissait pas, elle savait où elle allait. C’était presque un rituel.
Interviewer : Est-ce que vous avez souvenir de l’activité des chantiers, en dehors de ce qui se passait à l’intérieur des murs ?
Madame M F : On voyait l’activité quand on passait devant les chantiers parce qu’il y avait quand même plusieurs ouvertures. Il y avait la porte de Mouisseques.
Interviewer : Elle se situait où ?
Madame M F : Elle se situait là où se trouve le dernier bâtiment. Il y avait celui de l’atelier côté mer et puis il y avait l’autre bâtiment qui y est toujours aussi, il me semble.
Interviewer : C’est la jonction entre l’atelier chaudière et la zone à côté de l’atelier turbines.
Madame M F : Il y avait déjà cette entrée là.
Interviewer : On la voit toujours d’ailleurs, elle est murée au niveau du mur de l’atelier chaudière.
Madame M F : Après il y avait un grand mur qui fermait les chantiers et puis on arrivait à l’entrée, au bas de la rue qu’on appelait la « rue du gaz », c'est-à-dire la rue Henry Barbussse, où là il y avait l’entrée de la menuiserie. Là, c’était toujours ouvert. Il y avait, il me semble, une ligne de chemin de fer qui reliait jusqu’à la menuiserie. Donc, là, on voyait le chantier. Il y avait la porte principale. Il y avait la porte à hauteur de la direction, au niveau de la rotonde. Ce qui nous frappait, c’était les grues qui dépassaient les coques de navires. On ne voyait pas toujours les ouvriers, mais on voyait la vie des chantiers. Il y avait le bruit, quand on tapait sur les tôles, on l’entendait. Il y avait une musique, un ballet des chantiers, et tout ça faisait partie de la vie de La Seyne. Les chantiers, c’était le souffle de la ville. J’ai grands souvenirs quand je passais devant les chantiers. Je passais rarement parce que j’allais à l’école François Durand d’abord, puis au Collège Curie, je passais par l’intérieur, par l’avenue Esprit Armando qui s’appelait la route de Balaguier. Mais, là aussi on apercevait au loin les chantiers. Il fallait vivre à Tamaris ou aux Sablettes pour ne pas avoir vue sur les chantiers où, là, il y avait les collines qui séparaient la zone industrielle de la zone touristique et agricole. Dès l’instant où on habitait les quartiers autour des chantiers, on était totalement en lien. Par la vue et par l’ouïe, on était en lien avec les Chantiers.
Interviewer : Vous l’avez vu fonctionner le pont ?
Madame M F : Oui, quand j’étais sur le port et qu’arrivait un train, effectivement, on voyait le pont s’abaisser puis être relevé. Ça descendait lentement et ça remontait tout aussi lentement.
Interviewer : Tout à l’heure, vous m’aviez dit que vous aviez assisté à des lancements, est-ce que vous vous en souvenez de quelques-uns ?
Madame M F : Oui, d’abord il y avait toujours beaucoup de monde, c’était un événement. C’est un temps fort de la vie de la ville. Je vois bien les ouvriers tapant sur les épontilles. Au moment où tout est à bas, on se demande comment le navire tient. Tout d’un coup on voit la bouteille de champagne se fracasser contre la coque, la marraine ayant coupé le ruban. On entend le bruit de la sirène et le navire, doucement, doucement, glissant sur son berceau et allant prendre contact avec son élément. C’était un spectacle important dans la ville.
Interviewer : D’autre part, tout à l’heure nous avons parlé du comité d’entreprise avec les colonies de vacances, les après-midi récréatifs, est-ce qu’il y avait d’autres avantages liés aux chantiers ?
Madame M F : Il y avait la bibliothèque, juste à côté de la porte principale des chantiers. Il y avait le boulevard Toussaint Merle qui arrivait devant la porte et puis bifurquait pour aller vers la « rue du gaz » et puis prendre, évidement, la route vers les Mouisseques. Perpendiculaire à la porte d’entrée, il y avait un bâtiment où il y avait la bibliothèque que nous fréquentions. Nous allions régulièrement chercher des livres. C’était quelque chose de très positif puisqu’on pouvait avoir accès à la lecture gratuitement.
Interviewer : Il n’était peut-être pas évident d’acheter des livres à cette époque.
Madame M F : Voilà, c’était positif dans la mesure où ça permettait aux ouvriers d’avoir accès à la culture.
Interviewer : Elle était bien réservée aux ouvriers des chantiers ?
Madame M F : Oui, je me souviens qu’elle était ouverte en fin de journée. Il y avait des horaires très précis. Ce n’était pas toute la journée, ça devait être des ouvriers bénévoles qui prenaient en charge l’atelier de la bibliothèque.
Interviewer : Il se trouvait à proximité de la coopérative ?
Madame M F : Voilà, il y avait tout un bâtiment qui accueillait ces services.
Interviewer : Aujourd’hui, maintenant que les chantiers ont fermé, est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous pensez de la tournure des événements après les chantiers, par exemple l’aménagement du parc, etc.
Madame M F : Moi, ce que je regrette c’est qu’il n’y ait pas plus de bâtiments souvenirs.
Ce qui est dommage c’est qu’on n’ait pas fait le choix de garder tous les bâtiments et, en particulier, tout ce qui était les bureaux d’étude, la direction. Voire, à côté de la direction, il y avait le bureau de la sécurité sociale où on allait déposer ses dossiers de maladie.
C’est dommage qu’on ait démoli ces bâtiments parce qu’on aurait pu reconvertir tout ça en une grande maison des associations. On aurait gardé ce qui était, quand même, un élément de la ville. Ça serait bien qu’un jour il y ait un musée des chantiers navals qui rappelle l’histoire parce que je suis sûre, bon outre qu’il y a des archives des chantiers, je suis sûre qu’il doit y avoir des gens qui ont construit des maquettes. Il doit y avoir des ressources.
Ça serait bien que la municipalité se décide à garder ce patrimoine, pour qu’on garde des traces de ce qui a été l’élément identifiant de la ville.
Interviewer : Pour conclure, vous avez quitté la ville de La Seyne quand vous êtes devenue professeur d’histoire-géographie. Les chantiers existaient encore et, quand vous êtes revenue, ils n’existaient plus. Comment l’avez-vous ressenti lors de votre nouvelle installation dans la ville ?
Madame M F : J’ai quitté La Seyne en 74. C’était une ville pleine d’activités. Il y avait plus de six mille personnes qui travaillaient aux chantiers.
Je revenais régulièrement en vacances voir mes parents. Comme je travaillais d’abord dans le nord de la France, puis dans les Bouches-du-Rhône, même si je revenais, je n’ai pas trop vécu la fermeture des chantiers. J’en entendais parler, mais j’étais loin quand même. Je suis revenue en 95. Certes, je n’avais plus mes parents, les Chantiers étaient devenu une friche.
J’ai eu beaucoup de difficultés à retrouver des repères dans cette ville. D’autant que j’ai un amour très profond pour ma ville et j’avais un peu embelli la situation. J’avais un souvenir qui était un peu faussé.
J’ai eu des difficultés à retrouver mes marques dans la ville et c’était lié à la situation de ce moment-là, un terrain vague, des herbes sauvages qui poussaient sur le site des chantiers et une ville qui souffrait de la fermeture.
Quelque part on continue, nous sommes toujours profondément marqués par cette fermeture parce que qu’est ce qu’il y a comme avenir, c’est très problématique pour l’instant.
Ce qui est certain c’est que je suis très fière d’être une fille d’un ouvrier des chantiers.
J’ai un neveu qui a suivi un petit peu ma voie, non pas professionnelle, mais au niveau des études parce qu’il a fait un DEA sur les relations des chantiers avec l’Arsenal de Toulon. Un jour, il a été interviewé. Il a fait une petite émission sur France Bleu Provence et là, il a évoqué le souvenir de son grand-père. Il a dédicacé son mémoire à son grand-père, maître ouvrier et ce jour-là, mon père a reçu ses lettres de noblesse.