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Etre femme et immigrée à l'époque de la construction navale à la Seyne-sur-Mer

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Transcription : Fille d'un charpentier de marine dès 1933 et femme d'un technicien des chantiers dès 1971

Collecteur : Prestataire exterieur
Langue : Français

Qualité du son : mauvaise


Présentation du témoin Écouter cette séquence

Interviewer : Bonjour Catherine, tout d’abord pourriez-vous vous présenter ?
Madame M : Bonjour Lucas, je m’appelle Catherine M, née G. Je suis née à La Seyne, le 20 avril 1953, impasse des Mouettes, dans la maison de Mr et Mm G, à 200 mètres du 32 bd de la Corse Résistante où j’habite aujourd’hui.

Interviewer : Le 32 bd de la Corse Résistante, c’est votre domicile depuis quand ?
Madame M : Aussi loin que remontent mes souvenirs, c’est la maison qu’à construit mon père sur le terrain qu’il a acheté en 1953, donc on est ici depuis à peu près 1956.


L'arrivée à La Seyne-sur-Mer Écouter cette séquence

Interviewer : D’après votre nom de jeune fille, vos parents n’étaient peut être pas natif de La Seyne ?
Madame M : Non certainement pas, mes parents sont d’origine alsacienne. Mon père est né en Suisse et a été réintégré à la nationalité française par le Traité de 18, puisque mon grand-père n’avait pas voulu servir sous l’armée allemande.
Il a rencontré ma mère à St Louis, à la frontière suisse prés de Bâle où il s’est marié avec elle.
Mais mon père était déjà venu à La Seyne en 1933, puisqu’en Alsace, il y avait une crise économique forte et un chômage fort et que dans la région ici, il y avait l’attirance du chantier naval. Il est donc arrivé à cette époque là, à La Seyne.

Interviewer : Éventuellement, est ce qu’il a reçu un soutien ou une aide lorsqu’il s’est installé à La Seyne ?
Madame M : En fait, il est arrivé à La Seyne parce que dans le quartier de Tamaris et de Balaguier, qui avait de très belles villas, il y avait la villa Blanche, qui appartenait à Édouard BOURLET, qui était un écrivain du Théâtre parisien, il venait passer ses vacances. Donc, le gardien de cette Villa Blanche était alsacien. C’est lui qui accueillait tous les jeunes qui débarquaient, qu’il logeait en attendant qu’ils trouvent du boulot et qu’ils trouvent de quoi se loger. Mon père a passé quelques semaines dans cette Villa Blanche, a aimé le quartier de Balaguier. Il s’était promis que, s’il pouvait s’installer ici, il s’installerait et vingt ans plus tard, il achetait le terrain sur ce qui était alors La Route de Balaguier.


Charpentier de marine aux chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Que faisait votre père ?
Madame M : Mon père était charpentier. Il travaillait le bois. Donc, il est rentré comme charpentier de marine dans les Chantiers navals. Mais il a travaillé également dans d’autres entreprises. Il parlait de l’entreprise Garnerone qui était une menuiserie. Puis, il a participé, par exemple, à la construction des charpentes des Galeries Lafayette à Toulon.

Interviewer : Quand est-ce qu’il a ramené votre mère ici ?
Madame M : Ma mère est arrivée ici en 1939. Ensuite, mon père a été mobilisé. Il était chasseur alpin donc il est parti à la guerre. A la démobilisation, il est revenu sur Toulon. Il a travaillé dans différentes entreprises. Il a travaillé à l’arsenal de Toulon. Puis lorsqu’on l’a pressenti pour être interprète, il ne voulait pas collaborer, donc il est parti. Il a rejoint mes grands-parents qui étaient réfugiés, dans le Sud Ouest, après 40. Ils ont vécu le sabordage de la flotte. Ils ont vécu tout ça et puis il est parti.

Interviewer : En gros, c’est à peu près novembre ou décembre 42 ?
Madame M : Voilà, et à son retour, il a réintégré les chantiers de La Seyne. Il a préféré les Chantiers que l’arsenal parce qu’à l’époque les ouvriers du chantier étaient mieux payés que ceux de l’arsenal. C’est ce qui a motivé son choix et puis le choix aussi de s’installer à La Seyne et de pouvoir, par la suite, acheter un terrain et construire sa maison.

Interviewer : Est-ce que vous savez un peu, qu’est ce qu’il y faisait aux Chantiers ?
Madame M : Moi, je sais qu’il y traçait les tirant d’eau et que c’était un travail extrêmement précis. On était très fiers qu’il soit un maître ouvrier. Je sais aussi qu’il préparait les lancements et il était de ceux qui tapaient sur le bastingue qui tenait le bateau. Je ne sais pas du tout comment ça s’appelait. Dans mon esprit d’enfant, il me semblait que c’était grâce à lui que le bateau partait à la mer.

Interviewer : Est-ce qu’il avait des conditions de travail qui étaient particulières ou qui vous semblaient pénibles à l’époque ?
Madame M : D’abord, c’était le temps de travail qui était quand même beaucoup plus long, ça c’est clair. Ensuite, c’est vrai qu’il partait tôt le matin et qu’il rentrait tard le soir. Je sais qu’il se protégeait du froid. A l’époque il n’y avait peut être pas les Damart, alors il y avait ceux qui avaient des journaux et des grosses chemises, des ceintures en flanelle. Je sais que lui, il souffrait quand même du froid. Mais en même temps, c’était quelqu’un qui venait d’un pays encore plus froid donc il pouvait le supporter.

Interviewer : Vous disiez que juste après la guerre, il a eu le choix entre travailler à l’arsenal et travailler aux chantiers, mais est-ce qu’il n’aurait pas eu le choix également de continuer à travailler chez les artisans chez qui il a travaillé, avant la guerre ?
Madame M : Oui, mais la grosse entreprise était quand même plus intéressante en terme de développement de carrière, je pense, de sûreté de l’emploi. Je ne saurais pas dire ce qui l’a motivé exactement mais je sais que bon, voilà, rentrer aux Chantiers c’était entrer dans une grosse boite. C’était rentrer dans une entreprise où il pouvait faire carrière, avec des avantages aussi, des avantages tels que le comité d’entreprise, la mutuelle etc.


Le cinéma et la bibliothèque des chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Est-ce qu’il y avait des avantages pour les enfants de ceux qui travaillaient aux Chantiers ?
Madame M : Les avantages pour les enfants, c’était Noël. On avait une séance de cinéma où on avait des sachets de chocolat à la fin, je m’en souviens très bien. On allait au cinéma Rex à La Seyne, c’est là où il y a Charlemagne aujourd’hui. C’était l’événement, il y avait toujours des dessins animés. Enfin, la magie du cinéma, quand on était petite. On n’y allait pas tout le temps.

Interviewer : Ça c’est en ce qui concerne les loisirs, mais est-ce que vous aviez une aide par rapport à votre scolarité ? est-ce qu’il y avait une bibliothèque ?
Madame M : Oui, il y avait la bibliothèque des chantiers, bien-sûr, qui faisait même discothèque. Il y avait des disques vinyles. On pouvait aller les emprunter, bien sûr. Donc, on y allait ça c’est sûr.

Interviewer : Vous vous souvenez où elle était cette bibliothèque ?
Madame M : Tout à fait, la bibliothèque, elle était dans les bâtiments qui étaient à droite de l’ancienne porte, celle qui a été la seule survivante de l’ensemble des bâtiments. En fait, devant la porte il y avait une espèce de place qui était fermée par des bâtiments où était la bibliothèque.


L'atelier de menuiserie du père Écouter cette séquence

Interviewer : Tout à l’heure vous parliez de sécurité de l’emploi et de payes qui étaient plus élevées aux Chantiers, apparemment le salaire était assez intéressant. Est-ce que, cependant, il suffisait pour vous permettre de vivre et à vos parents de rembourser le prêt qu’ils ont probablement fait pour le terrain et la maison ?
Madame M : Oui, bien c’est sûr qu’à côté de son travail aux chantiers mon père avait un atelier sous la maison, au rez-de-chaussée de la maison. Il faisait beaucoup, ce qu’on appelait à l’époque, on disait il bricolait. C'est-à-dire qu’il utilisait ses talents de menuisier à la demande et nombre de personnes sont venues lui demander, des volets, des fenêtres. J’ai même vu réparer des tonneaux pour les vendanges, j’ai oublié le nom. Les hottes, les vendangeurs, les fauteuils, toutes sortes de choses sont passées dans les mains de mon père. Moi, ce que j’aimais d’ailleurs, c’est quand il allait choisir le bois parce qu’il ne choisissait pas n’importe quel bois. Après, on livrait le bois à la maison. Le bois avait une odeur, j’ai encore cette odeur du bois. Puis, en bas, ce qu’on appelait en bas, c'est-à-dire dans l’atelier, il y avait toujours de la sciure et pleins de petits bois et ça c’était des jouets extraordinaires. Puis, il y avait une vieille cuisinière où on faisait brûler la sciure. Ma mère faisait la lessive dans la lessiveuse. C’était un endroit qui était chaud. On aimait bien aller jouer avec des clous et des bouts de bois.


L'élevage de poules, de lapins de la mère Écouter cette séquence

Interviewer : Par ailleurs, vous avez un beau jardin devant la maison, est ce que vos parents le mettaient à profit ?
Madame M : Oui, ça c’est évident qu’il y avait un apport par le jardinage et que pas un centimètre carré de ce terrain n’était inutilisé. Il y avait aussi des petits élevages, comme partout dans les maisons du voisinage. Un petit élevage avec des poules, des lapins et des pintades pour Noël. Puis le fumier des lapins, il servait à l’assolement du jardin, c’était une économie, effectivement, domestique forte.

Interviewer : Ce que votre mère produisait avec le jardin et avec l’élevage, bon il est bien évident que vous l’utilisiez pour votre propre consommation. Est-ce que votre mère avait cependant l’occasion de le vendre à l’extérieur ?
Madame M : Il y avait toujours des gens qui venaient chercher des œufs parce qu’ils aimaient les œufs frais. Ma mère allait deux fois par semaine au marché de Toulon parce qu’il était réputé, et puis c’était vrai il était moins cher que celui de La Seyne. Donc, à Toulon elle avait un itinéraire bien précis. Alors, à l’époque on prenait le car étoile. On descendait sur la place de la Liberté et puis on allait chez Bertrand, à Prisunic après la place Puget. Puis la rue des Triperies, où là, je sais qu’elle apportait des œufs, des lapins. Elle récupérait un peu de sous comme ça ou elle échangeait partie troc, partie vente.

Interviewer : Et donc ce fameux Bertrand, c’était... ?
Madame M : Il y a un Carnivore à la place, c’était un boucher réputé avec une alimentation entre le théâtre et la place Puget, c’était incontournable quand on allait faire les courses. C’était un rituel.


Les heures supplémentaires Écouter cette séquence

Interviewer : Par ailleurs, pour améliorer les fins de mois, est-ce qu’il arrivait à votre père de travailler plus que la durée normale ?
Madame M : Bien sûr, il faisait des heures supplémentaires. Il allait faire des nuits, il allait faire des samedis et des dimanches. Puis, il arrivait aussi qu’il aille travailler en face de chez nous, il y avait le chantier Galiant. Il fabriquait à l’époque des pointus. Ça aussi c’était un souvenir d’enfant. Moi, j’aimais y aller parce qu’il fabriquait des pointus donc, il y avait des espèces de longs tuyaux qui chauffaient, il y avait de la vapeur, pour plier les planches pour les pointus. Je sais qu’il allait donner un coup de main, là aussi. Chaque fois qu’il pouvait travailler, il travaillait.


Les vacances en Alsace Écouter cette séquence

Interviewer : J’imagine surtout, lorsque en même temps il construisait la maison où vous habitez aujourd’hui.
Madame M : Il construisait la maison et puis aussi, je dois dire que moi, mes parents ont toujours eu la culture des vacances. C’est peut-être aussi parce qu’on était immigrés et que donc, comme tous les immigrés, l’été on partait dans le pays d’origine. Tous les étés on remontait voir les grands-parents en Alsace. On prenait le train, là aussi c’était un événement. Le train à vapeur, on prenait le train de nuit. Je me souviens encore quand on arrivait le matin dans le Jura, qu’on voyait les vaches, c’était un événement. On allait voir nos grands-parents, moi j’étais trop petite mais je me souviens des virées en vélo que faisait mon père avec mes sœurs. Là aussi c’était un plaisir de faire une balade et des visites en Alsace. C’est comme ça que moi j’ai connu l’Alsace.

Interviewer : Oui d’ailleurs, je crois que vos parents avaient habité un certain temps dans les Vosges ?
Madame M : Non, on y allait en vacances. Là aussi, j’ai le souvenir d’avoir été à Krutt, dans les Vosges, mon Dieu c’était l’Alsace profonde. On était dans une ferme avec des lits très, très haut avec des grosses couettes, vraiment l’image d’Épinal de l’Alsace. Puis, le matin aux aurores, je me rappelle que la fermière, elle nous réveillait, en appelant ses poules en faisant, bip, bip, bip ; bip, bip, bip. Puis, c’était en fait le bruit du Spoutnik. C’était le premier lancement du Spoutnik, ça faisait ce bruit-là et nous ça nous faisait rigoler. On disait que la fermière, elle se prenait pour le Spoutnik.


Les amis et les voisins Écouter cette séquence

Interviewer : Sur un autre plan, est-ce que vos parents avaient beaucoup de relations amicales, sur différents niveaux peut-être ?
Madame M : Oui, ils avaient des amis. Alors, il y avait déjà le cercle de relations de gens de même origine, c'est-à-dire alsacienne. Il y avait d’autres familles alsaciennes, dans la région. Je me souviens les M, les C et donc il y avait ce lien dû à l’appartenance, je veux dire presque ethnique puis à la pratique de l’alsacien aussi. Là aussi, j’ai des souvenirs mémorables de ma mère voyageant avec des dames alsaciennes dans le bus et faisant des commentaires sur tous les gens du bus, dans leur langue. Elle ne s’en privait pas, ou alors quand elle nous engueulait parce qu’avec nous elle pratiquait essentiellement le français. Elle ne voulait pas trop qu’on parle alsacien pour qu’on ne subisse pas une exclusion du fait de l’accent du langage, mais quand elle nous engueulait et qu’elle parlait en alsacien, là on savait que c’était sérieux, il valait mieux se défiler.

Interviewer : Par ailleurs, votre père avait peut être des amis aux Chantiers ?
Madame M : Voilà, il avait des collègues de travail et puis il y avait les voisins. Ici par exemple, sur le coin, quand on est arrivé il n’y avait pas tous les immeubles qui existent actuellement. Il y avait très peu de maisons. Par contre, le quartier s’est construit, toutes les maisons qui sont autour étaient habitées par les ouvriers des Chantiers. Les maisons se sont construites en même temps. D’ailleurs, il y a des plans identiques avec les maisons voisines et il y avait une solidarité de la construction qui pouvait dégénérer en conflit aussi. Ils pouvaient se disputer pour un sac de ciment non rendu. Il y avait aussi cette solidarité de voisinage et puis les collègues de travail bien sûr. D’ailleurs, on l’appelait Mr Victor parce que Mr G, c’était impossible à dire. Donc, on était connu sous le nom de Mr et Mme Victor. Même des années après la mort de mon père, on avait encore eu des coups de téléphone en disant est-ce que Mr Victor peut réparer un volet ou une fenêtre, G on ne connaissait pas.

Interviewer : Dans le voisinage, je pense que les amis devaient mettre à profit les compétences particulières de Victor ?
Madame M : Oui, tout ce qui était autour du bois, on lui demandait des conseils bien sûr, voire on lui apportait le travail, ou on venait le chercher. Je peux dire que moi-même, sa propre fille, quand on a construit notre première maison, c’est lui qui a fait toutes les menuiseries et la charpente c’est lui qui l’a posée. Ici, sur le quartier beaucoup de maisons se sont construites en même temps et il y a eu aussi une solidarité du travail mais, par contre, si vous regardez les toitures, vous remarquerez que notre maison, elle a une particularité. C’est le seul toit quatre pentes de tout le coin parce que la fierté de mon père c’était la charpente, c’était son métier. Donc sur notre maison, il y a une charpente qui a quatre pentes et qui n’a pas besoin de mur maître pour tenir. C’est véritablement un chapeau posé sur la maison. Donc, c’était unique dans le quartier.

Interviewer : Ça c’était assez complexe, je pense ?
Madame M : Voilà, bien c’est un art la charpente, aussi. Elle tient par elle-même. Donc, il y a simplement une poutre et un pilier qui tient le plancher de la maison en dessous, mais il n’y a absolument besoin d’aucun mur maître. Ça c’était la fierté de mon père. Effectivement la maison d’à côté n’a pas de toiture, ce qui pour mon père était une hérésie, une maison sans toit, un toit plat, ce n’est pas un toit.


Le rêve, sortir du monde ouvrier Écouter cette séquence

Interviewer : Je voudrais passer à autre chose de complètement différent. Je crois que vous étiez trois sœurs ?
Madame M : Oui, trois filles pour leur mère et quatre diables pour le père.

Interviewer : Donc l’aînée Mireille, Marie-France et vous Catherine, de quelle façon vos parents vous ont-ils éduquées et montré le chemin, est-ce que, par exemple, ils voulaient que vous entriez aux chantiers ?
Madame M : Pour mes parents, le plus important c’était l’école. L’école, c’était le moyen de s’en sortir. Et surtout ils étaient vraiment motivés par l’idée qu’il fallait que leurs enfants réussissent mieux, "tu feras mieux que ton père". Ça c’était un élément extrêmement moteur pour pousser les enfants à travailler à l’école qui, à ce moment là, était l’ascenseur social. Pouvoir aller à l’école, c’était pouvoir rentrer dans l’administration. Le rêve de mon père ce n’était pas de nous voir entrer dans les chantiers de La Seyne, mais de nous voir entrer dans l’administration.
On a toutes passé le concours de l’Ecole Normale à Draguignan, qui étai,t à l’époque, la préfecture parce qu’effectivement le métier d’enseignant paraissait le sommet des métiers, un peu ce qu'il y avait dans « La gloire de mon père ». Instituteur, c’est celui qui sait, qui a le savoir. Ça c’était vraiment le rêve de nos parents de nous voir réussir à l’école pour pouvoir avoir des métiers qui nous fassent sortir de la condition ouvrière. C’était plus noble de tenir un crayon qu’un outil et c’était la vision qu’ils en avaient.

Interviewer : Qu’est-il advenu de vos sœurs et de vous-même ?
Madame M : Une sœur est entrée dans l’administration aux PTT, l’autre est enseignante. Elle a réalisé le sommet de ce qui pouvait être fait puisqu’elle est devenue professeur. Moi, j’ai travaillé à la sécurité sociale et puis je me suis arrêtée parce que j’ai eu des enfants. Voilà, on a toutes réussi notre parcours scolaire enfin, entre guillemets.
Ceci dit, le monde a changé aujourd’hui aussi. A l’époque, la condition ouvrière était vraiment marquée et d’ailleurs là où on voyait bien la différence c’est que, par exemple, sur le quartier de Tamaris, c’était le quartier où il y avait encore, à l’époque, des directeurs qui habitaient, le directeur des chantiers, à l’époque c’était Mr Pintard, il y avait Mr Delachaise qui était directeur de l’Air Liquide. Puis ils allaient à la messe dans la chapelle du château de Michel Pacha à l’époque qui était desservie par la paroisse de Mar-Vivo. On voyait bien là qu’il y avait deux mondes. Il y avait le monde des ingénieurs, des cols blancs quoi et le monde des ouvriers, donc le rêve c’était qu’on sorte du monde ouvrier.


Le service des chantiers à la sécurité sociale Écouter cette séquence

Interviewer : Et vous donc vous avez travaillé à la sécurité sociale, à celle de La Seyne ?
Madame M : Voilà, celle qui est sur La Seyne, oui, sur le port. Alors, je travaillais dans le service des chantiers. A La Seyne, à la sécurité sociale, il y avait un service spécifique pour le chantier de La Seyne qui avait une mutuelle. Donc en fait, les ouvriers des Chantiers ne venaient jamais à la sécurité sociale. On passait tous leurs dossiers à la mutuelle qui avait d’ailleurs une pharmacie, ça aussi c’était un souvenir important. Parce que quand on allait là-bas à la pharmacie, on nous donnait un réglisse. Sur la dernière étagère du haut, il y avait une boite avec des réglisse dedans. Quand l’opération des délivrances des médicaments était terminée, la pharmacienne prenait la boite et nous donnait un réglisse. Moi, j’y allais rien que pour ça. Mais de fait, voilà, après les dossiers étaient transmis à la sécurité sociale et moi j’ai travaillé tout un temps sur ces dossiers là. D’ailleurs, c’était en automne qu’on avait le plus de boulot. C’est là qu’on disait que tous les gars du chantier allaient à la chasse et prenaient un arrêt de travail pour aller à la chasse.


Les lancements de bateaux Écouter cette séquence

Interviewer : Souvent, quand on parle de construction navale à La Seyne, on voit les grands chantiers navals, Forges et Chantiers de la Méditerranée et CNIM, est-ce qu’il n’y avait que ces chantiers là que vous connaissiez ?
Madame M : Non, nous on connaissait, bien je vous ai parlé du chantier Galiant qui est devenu IMS maintenant, le grand chantier de réparation navale et de construction de bateau à la petite mer. Avant, quand j’étais petite, il était sur la colline en face, de l’autre côté de la rue. Puis, il y avait les chantiers du midi qui étaient dans la baie de Balaguier. Là aussi, c’était des souvenirs importants, pour nous enfants parce que quand il y avait un lancement c’était un événement parce qu’ils étaient obligés de mettre des grosses poutres en travers de la route pour pouvoir faire passer le bateau, que le bateau franchisse la route et arrive à la mer. Il construisait des vedettes, style des vedettes qui faisaient Bandol-Bendor, des petites vedettes comme ça. Mais, c’était un événement, parce qu’il y avait la fanfare, il y avait un apéritif avec des cacahuètes. Nous, on allait manger les cacahuètes. Puis en plus, on disait que devant le chantier, là dans la mer il y avait une fosse. On n’allait pas se baigner là, on avait peur parce qu’on disait que c’était trop profond, c’était pour que les bateaux puissent partir. On imaginait vingt milles lieux sous les mers, c’était assez rigolo.
Puis, on courrait aussi sur la corniche quand il y avait le passage des chars AMX 13. Là aussi, c’était un événement quand ils passaient à toute allure en bas de la corniche, on courait les voir. On y allait souvent parce que c’était notre plage, c’est là qu’on allait se baigner, c’est là que j’ai appris à nager. On allait à la pêche aussi. Donc, on voyait passer les chars sur la corniche. La route, elle ne s’en est jamais remise.

Interviewer : S’ils passaient vite effectivement, les 13 tonnes devaient avoir pas mal d’effet. Justement vous parliez des lancement aux chantiers du midi, est-ce que vous en avez vu aux chantiers de La Seyne ?
Madame M : Ah oui, bien sûr, alors dire quel bateau, je ne me souviens pas. J’étais petite mais je me rappelle très bien. Moi ce que j’ai dans l’esprit c’était ces tonnes et ces tonnes de chaînes qui se déroulaient lorsque le bateau partait à la mer et puis le monde qu’il y avait. Là aussi, la musique, la bouteille, cette ambiance, le baptême, c’était l’événement Après on pouvait visiter le bateau aussi quand il était fini. Alors, je me souviens un qui est resté bien ancré dans la mémoire, c’est le Sagafyord, qui était un paquebot de luxe. C’était une pure merveille, à l’intérieur, ça je m’en souviens très bien. On avait pu le visiter.

Interviewer : C’est sûr que ces lancements constituent le souvenir essentiel qu’on a des Chantiers aujourd’hui, comme l’est également un des derniers vestiges qui reste de ces Chantiers navals, qu’est le fameux pont basculant qui enjambe, ou peut enjamber, le port de La Seyne, est-ce que vous en avez des souvenirs.
Madame M : Bien sûr, c’était aussi l’événement quand on était enfant d’arriver au moment où le pont s’abaissait que le train passait, le pont c’est la tour Eiffel de La Seyne. Par contre, il y a aussi le souvenir de ce moment où des wagons se sont détachés depuis la gare de La Seyne et ont dévalé jusqu’au port et se sont plantés dans le port. C’était un vrai miracle parce qu’effectivement le passage traversait le parking des Esplagoles et que ça a été miraculeux qu’il n’y ait pas eu un seul accident, ni personne, ni rien devant les wagons qui sont descendus, qui ont tout traversé et qui sont allés plonger dans le port. D’ailleurs, pendant tout un temps il y avait la grue Atlas qui prenait les bateaux de pêche et qui les passait par-dessus parce que l’entrée du pont a été bouchée. Ce n’était pas une sardine comme à Marseille, c’était les wagons qui s’étaient plantés droits dans la passe.


La sirène des chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Ça signifie que quand il y avait un train qui traversait, il y avait déjà le pont qui s’abaissait, qui bloquait le port mais il devait y avoir aussi pas mal de remue-ménage dans la ville en elle-même, puisque le train traversait ?
Madame M : Oui, mais alors ça ce n’était rien du tout à côté de la sortie des Chantiers. S’il y avait des heures à éviter de circuler c’était au moment de la sortie des chantiers. Dès qu’il y avait la sirène, il y avait un fleuve de piétons, de mobylettes, de vélos, de voitures qui sortaient depuis les chantiers et alors là c’était la folie pour circuler. Il fallait éviter absolument l’entrée et la sortie des chantiers. C’était impressionnant de voir le mouvement qu’il y avait à ce moment là, faut dire qu’il y avait du monde, aux chantiers.

Interviewer : Est-ce qu’il y a une sonnerie qui pour vous avait une signification particulière ?
Madame M : Oui, d’abord celle qui annonçait le retour du père, quand on entendait six heures et quart on se dépêchait de rentrer pour être là quand il était là.
Puis, il y avait huit heures et quart, huit heures vingt cinq, huit heures et demie, ça, ça correspondait à l’heure de l’école. Si à la première sonnerie on n’était pas parties, parce que moi j’allais à l’école Malsert qui, à l’époque, s’appelait François Durand, ça voulait dire qu’il fallait partir en courant. On aurait été en retard. Le matin aussi quand ça sonnait, à sept heures et quart. Quant on allait au lycée c’était pareil. Il fallait être parties avant la sonnerie parce que quand ça sonnait, c’était foutu. On allait être en retard. Une heure et quart pareil, je m’en rappelle, quand on allait au lycée. Si à vingt cinq je n’étais pas partie, à la demie je n’étais pas partie, je risquais d’arriver en retard.
C’était vraiment la sirène des chantiers qui nous donnait l’heure. Ce n’était pas la cloche de l’église, mais la sirène des chantiers.


Technicien aux chantiers puis ingénieur Écouter cette séquence

Interviewer : Jusqu’à maintenant nous avons parlé de votre père qui travaillait aux chantiers, est-ce qu’il y a quelqu’un d’autre de votre entourage, de votre famille, qui y a travaillé ?
Madame M : Oui, mon mari. Mon mari qui a travaillé aux chantiers de La Seyne qui en est parti pour aller à l’école et qui est revenu à sa sortie de l’école. Il n’est pas resté aux chantiers parce qu’en fait, son statut d’ingénieur n’était pas reconnu, donc il a préféré quitter le chantier. Mais c’est vrai qu’à l’époque on lui a dit qu’il était un peu fou de quitter le chantier, puis l’avenir a démontré le contraire. Il était aux chantiers, il était technicien. On l’appelait le Professeur Tournesol parce qu’il avait fabriqué une machine à vérifier les soudures dans les cuves des méthaniers. C’était la grande période des méthaniers.
Lui aussi, il a beaucoup travaillé. Il a fait des heures supplémentaires, des nuits pour vérifier les cuves. Il fallait que la vérification des cuves soit terminée pour que le travail puisse continuer donc c’était une sacrée embellie, à ce moment là, il y avait du boulot, ce n’était pas difficile de rentrer aux chantiers. Il a fait le choix de faire des études parce qu’il voulait être ingénieur, bien lui en a pris, parce que le chantier a fermé ensuite.

Interviewer : Et il était de La Seyne votre mari ?
Madame M : Non, Fernand n’était pas de La Seyne. Il est né au Maroc. Son père a travaillé dans les phosphates. Il est arrivé dans les années 60, d’abord à Marseille, avant La Seyne. En fait, il est venu à La Seyne parce que sa tante habitait la Banane, à la cité Berthe. Il avait dit à mon beau-père que la ville de La Seyne était une belle ville ; que la ville était bien, qu’il y avait du travail. Donc, curieusement il est venu habiter au 3 rue Jean-Louis Mabily et c’était le même propriétaire que le terrain où mon père a construit la maison. Quand j’ai présenté mes parents à ceux de Fernand, on est allés à la rue Mabily. Quand mon père est rentré, la première chose qu’il a dit : « mais, je suis déjà venu ici ». Il était venu signer le compromis d’achat du terrain à la maison qu’avaient acheté les parents de Fernand au 3 rue Jean-Louis Mabily. C’est rigolo.

Interviewer : Le père de votre mari, donc votre beau-père, avait travaillé aux chantiers également ?
Madame M : Non, lui il a travaillé à "la Provençale" qui réparait les wagons et qui réparait les trains. Non, il n’a pas travaillé aux Chantiers. Mon beau-frère a travaillé aux Chantiers à la SNEF, exactement, qui était une filiale des Chantiers. Il y a travaillé quelques temps.

Interviewer : Donc en gros votre mari a commencé à travailler en quelle année aux Chantiers ?
Madame M : Il a dû commencer à travailler en 71-72 dans ces eaux là. Il en est parti en 76 pour trois années d’études. Puis, quand il est revenu, il travaillait sur les machines de chargement des centrales nucléaires. Puis, après il a quitté l’entreprise.

Interviewer : Sous quelles conditions il est parti faire ses études ?
Madame M : Alors, ça a été un bras de fer avec la direction des chantiers parce que normalement, il aurait pu partir dans le cadre de la formation continue avec un maintien de salaire et, en fait, si le syndicat n’était pas intervenu, ils lui demandaient de démissionner. Donc, il a obtenu un congé sans solde grâce aux syndicats. Il a eu une rémunération de l’État qui était un tiers de son salaire. C’était un sacrifice à l’époque. Mais, voilà le Chantier ne favorisait pas précisément la promotion. Donc, il est parti avec le minimum. C’était important pour qu’il puisse avoir quelque chose au retour. Donc, il est revenu aux chantiers, mais il n’est pas resté longtemps.

Interviewer : Et qu’a-t-il fait par la suite ?
Madame M : Par la suite, il a travaillé à Texas Instrument à Antibes. Puis, en fin 79, il a été appelé à l’arsenal. Le 1er janvier 80, il rentrait à l’arsenal de Toulon, de l’autre côté de la rade et il y est toujours.


L'ambiance aux chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Est-ce que votre mari avait des relations avec des gens du chantier ?
Madame M : Oui, bien sûr et il en a toujours. Il a toujours un lien avec les anciens du service contrôle. Il y avait une ambiance assez sympa. Moi, je me souviens des petits-déjeuners qu’ils faisaient au moment de Noël, avec des huîtres et du vin blanc ou alors quand ils se retrouvaient à St-Mandrier, tous les copains du chantier, dont un habitait St-Mandrier. Il y avait le bar des pêcheurs à St-Mandrier qui a vu de sacrées fêtes. Oui, il y avait une très bonne ambiance.

Interviewer : Est-ce que vous avez eu des échos de la façon dont il était perçu ?
Madame M : Ah oui, parce que quand j’ai annoncé à mon papa que j’allais me marier, mon père qui travaillait encore aux chantiers de La Seyne, est allé, à l’époque, faire son enquête pour savoir si c’était quelqu’un qui était sérieux, qui travaillait. A l’époque, il allait au CNAM, il prenait des cours du soir, au Conservatoire National des Arts et Métiers. Donc, il passait pour l’intello du groupe. Mon père avait eu que des bons échos et c’est pour ça qu’il a accepté mon mariage. S’il avait dit non ce n’était pas le problème, mais bon voilà. C’est pour montrer qu’il avait une bonne réputation aux chantiers.


Un bracelet fait aux chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Tout à l’heure vous m’avez également parlé du bracelet que vous portez à votre poignet, à gauche.
Madame M : Oui, c’est celui qui m’a été offert, le 14 février, jour de la St Valentin, 1974. Un an avant qu’on se marie. Il a été fabriqué à partir de baguettes de soudure inoxydable, torsadées sur un tour, écrasées en étant posées sur le rail en faisant passer le train dessus. Puis, il a été poncé et poli. Ça fait donc, trente et quelques années que je l’ai au poignet.

Interviewer : Il n’a pas pris une ride.
Madame M : Ah non, il est dans un pur acier inoxydable. Donc, voilà c’est la fabrication d’objet comme ça, aux chantiers de La Seyne.

Interviewer : C’est ce qu’on appelait la bricole. Donc, il s’est trouvé que quand vous vous êtes mariés, vous travailliez tous les deux.
Madame M : Je travaillais à la sécurité sociale et lui il travaillait aux chantiers de La Seyne. On s’est mariés un 1er avril personne n’y croyait. Tout le monde pensait que c’était un canular mais de fait, on s’est mariés un 1er avril. Témoin, l’article de "Var matin" qui montrait les mariés arrivant en moto, puisqu’on s’est mariés en moto. On a fait aussi un bel embouteillage sur le port en débarquant en moto.

Interviewer : Il aime la moto ?
Madame M : Ah oui, Fernand, c’était un fan de deux roues. Je l’ai toujours connu avec les mains sales jusqu’à ce qu’il achète la BM sur laquelle on s’est mariés. C’est la première moto un peu neuve qu’il achetait. Sinon, avant ce n’étaient que des occasions et il avait toujours les mains pleines de cambouis, vu qu’il avait toujours les mains dans le moteur, ça c’est sûr.


Le départ des chantiers Écouter cette séquence

Interviewer : Donc vous avez eu, je crois, trois enfants avec lui ?
Madame M : Oui, deux filles et un garçon.

Interviewer : Effectivement, pour eux l’orientation vers les chantiers ne se pose pas, vu que les chantiers ont fermé pendant qu’ils étaient encore assez jeunes. Mais effectivement, peut-être que le départ des chantiers de votre mari a fait que ça ne lui a peut-être pas laissé un excellent souvenir, non plus.
Madame M : Disons que, c’est sûr qu’on n’a pas connu le problème de la reconversion puisqu’il a quitté les chantiers à un moment donné où il y avait encore du boulot. On lui avait même dit qu’il était fou de partir. Je me souviens même que mes parents étaient inquiets de le voir partir, en se disant mais est ce qu’il ne lâche pas la proie pour l’ombre. Et du fait, non puisqu’à la fermeture des chantiers, ça faisait déjà neuf ans qu’il était de l’autre côté de la rade. Mais, c’est vrai que bon voilà, ça a été un moment de sa vie aussi de travailler aux chantiers. Ce n’était pas rien. C’est d’ailleurs à ce titre là qu’il pourrait partir plus tôt en retraite puisqu’il a été exposé à l’amiante et qu’il pourrait bénéficier du départ anticipé à la retraite.

Interviewer : Quand il a commencé à travailler à l’arsenal, juste en face des chantiers, est-ce qu’il a eu l’occasion d’avoir des relations avec les chantiers navals ?
Madame M : Absolument, parce qu’en fait il était chargé de l’armement d’un des derniers bateaux qui a été fait aux chantiers, de la Somme. Et à ce titre là, il a eu des relations avec les chantiers. D’ailleurs, c’est à lui qu’il faut poser la question. Ce que je me souviens, c’est qu’ils sont allés récupérer le bateau quasiment de force, mais c’est sûr que ça lui a fait quelque chose quand même.


La rencontre avec mon futur mari Écouter cette séquence

Interviewer : Par ailleurs, quelles ont été les circonstances de votre rencontre avec votre futur mari, c’était lié aux chantiers navals ?
Madame M : Pas du tout, en fait j’ai rencontré mon mari, j’avais 12 ans, il en avait 17. On était dans le même groupe folklorique « l’Escole de la Souco ». Le recrutement se faisait par l’intermédiaire d’une prof de musique du lycée Beaussier, qui invitait tous ses élèves à rejoindre le groupe. Moi, j’avais une copine, une voisine, qui y allait et c’est par elle que j’y suis allée. C’est là que j’ai rencontré Fernand. Ce n’est pas du tout en lien avec les chantiers parce qu’on était encore à l’âge scolaire.

Interviewer : A ce moment là, votre mari Fernand était à Beaussier.
Madame M : Et moi aussi, j’y rentrais. A l’époque, à Beaussier, on y allait à partir de la 4ème. A mon époque, il n’y avait qu’un seul collège, c’était Curie et puis le collège technique de Martini mais Curie c’était 6ème et 5ème. A partir de la 4ème, on allait à Beaussier. C’est donc à partir de là que je suis allée à « l’Escole de la Souco » et que j’ai rencontré Fernand. Donc, on s’est connus et ce n’était pas en lien avec les chantiers. Par contre, c’est à cause de lui que je suis rentrée à la sécurité sociale parce que je ne voulais pas partir de La Seyne et qu’il fallait que je bosse.


L'entrée à la sécurité sociale en 1973 Écouter cette séquence

Interviewer : Et vous n'y êtes pas rentrée par voie de concours, directement ?
Madame M : À l’époque, c’est là qu’on voit la différence avec aujourd’hui. A l’époque, il suffisait d’aller à l’ANPE et elle vous proposait réellement du travail. Moi, ils m’ont proposé un contrat de six mois à la sécurité sociale. Puis après, j’ai passé le concours, qui était très simple. Comme je suis arrivée dans les premières, j’ai pu choisir mon affectation et je suis restée à La Seyne. Donc, je n’ai pas trop bougé. C’était pour rester à La Seyne, pour pouvoir me marier. Je suis rentrée à la sécurité sociale en 73.

Interviewer : Très bien, je pense que nous pouvons nous arrêter là pour aujourd’hui et je vous remercie de l’attention que vous avez pu nous accorder.
Madame M : Ce fût un plaisir.